Charles Perrault. Le petit Poucet. Книга для чтения на французском языке
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Il les tira de dessous le lit, l'un apr`es l'autre. Ces pauvres enfants se mirent `a genoux, en lui demandant pardon; mais ils avaient affaire au plus cruel de tous les ogres, qui, bien loin d'avoir de la piti'e, les d'evorait d'ej`a des yeux, et disait `a sa femme que ce seraient l`a de friands morceaux, lorsqu'elle leur aurait fait une bonne sauce. Il alla prendre un grand couteau ; et en approchant de ces pauvres enfants, il l'aiguisait sur une longue pierre, qu'il tenait `a sa main gauche. Il en avait d'ej`a empoign'e un, lorsque sa femme lui dit : " Que voulez-vous faire `a l'heure qu'il est ? n'aurez-vous pas assez de temps demain ?
– Tais-toi, reprit l'Ogre, ils en seront plus mortifi'es.
– Mais vous avez encore l`a tant de viande, reprit sa femme : voil`a un veau, deux moutons et la moiti'e d'un cochon !
– Tu as raison, dit l'Ogre : donne-leur bien `a souper afin qu'ils ne maigrissent pas, et va les mener coucher. "
La bonne femme fut ravie de joie, et leur porta bien `a souper; mais ils ne purent manger, tant ils 'etaient saisis de peur. Pour l'Ogre, il se remit `a boire, ravi d'avoir de quoi si bien r'egaler ses amis. Il but une douzaine de coups de plus qu'`a l'ordinaire : ce qui lui donna un peu dans la t^ete, et l'obligea de s'aller coucher.
7. Lisez le fragment et faites le devoir ! Intitulez le passage!
L'Ogre avait sept filles, qui n''etaient encore que des enfants. Ces petites ogresses avaient toutes le teint fort beau, parce qu'elles mangeaient de la chair fra^iche, comme leur p`ere ; mais elles avaient de petits yeux gris et tout ronds, le nez crochu, et une fort grande bouche, avec de longues dents fort aigu"es et fort 'eloign'ees l'une de l'autre. Elles n''etaient pas encore fort m'echantes; mais elles promettaient beaucoup, car elles mordaient d'ej`a les petits enfants pour en sucer le sang. On les avait fait coucher de bonne heure, et elles 'etaient toutes sept dans un grand lit, ayant chacune une couronne d'or sur la t^ete. Il y avait dans la m^eme chambre un autre lit de la m^eme grandeur: ce fut dans ce lit que la femme de l'Ogre mit coucher les sept petits garcons; apr`es quoi, elle s'alla coucher aupr`es de son mari.
Le petit Poucet, qui avait remarqu'e que les filles de l'Ogre avaient des couronnes d'or sur la t^ete, et qui craignait qu'il ne pr^it `a l'Ogre quelques remords de ne les avoir pas 'egorg'es d`es le soir m^eme, se leva vers le milieu de la nuit, et prenant les bonnets de ses fr`eres et le sien, il alla tout doucement les mettre sur la t^ete des sept filles de l'Ogre, apr`es leur avoir ^ot'e leurs couronnes d'or, qu'il mit sur la t^ete de ses fr`eres, et sur la sienne afin que l'Ogre les pr^it pour ses filles, et ses filles pour les garcons qu'il voulait 'egorger.
La chose r'eussit comme il l'avait pens'e ; car l'Ogre, s''etant 'eveill'e sur le minuit, eut regret d'avoir diff'er'e au lendemain ce qu'il pouvait ex'ecuter la veille. Il se jeta donc brusquement hors du lit, et, prenant son grand couteau: " Allons voir, dit-il, comment se portent nos petits dr^oles; n'en faisons pas `a deux fois. "
Il monta donc `a t^atons `a la chambre de ses filles, et s'approcha du lit o`u 'etaient les petits garcons, qui dormaient tous, except'e le petit Poucet, qui eut bien peur lorsqu'il sentit la main de l'Ogre qui lui t^atait la t^ete, comme il avait t^at'e celles de tous ses fr`eres. L'Ogre, qui sentit les couronnes d'or : " Vraiment, dit- il, j'allais faire l`a un bel ouvrage; je vois bien que je bus trop hier au soir. "
Il alla ensuite au lit de ses filles, o`u ayant senti les petits bonnets des garcons: " Ah ! les voil`a, dit-il, nos gaillards ; travaillons hardiment. "
En disant ces mots, il coupa, sans balancer, la gorge `a ses sept filles. Fort content de cette exp'edition, il alla se recoucher aupr`es de sa femme. Aussit^ot que le petit Poucet entendit ronfler l'Ogre, il r'eveilla ses fr`eres, et leur dit de s'habiller promptement et de le suivre. Ils descendirent doucement dans le jardin et saut`erent par-dessus les murailles. Ils coururent presque toute la nuit, toujours en tremblant, et sans savoir o`u ils allaient.
8. Lisez le fragment et faites le devoir ! Intitulez le passage!
L'Ogre, s''etant 'eveill'e, dit `a sa femme : " Va-t'en l`a-haut habiller ces petits dr^oles d'hier au soir. "
L'Ogresse fut fort 'etonn'ee de la bont'e de son mari, ne se doutant point de la mani`ere qu'il entendait qu'elle les habill^at, et croyant qu'il lui ordonnait de les aller v^etir, elle monta en haut, o`u elle fut bien surprise, lorsqu'elle apercut ses sept filles 'egorg'ees et nageant dans leur sang. Elle commenca par s''evanouir, car c'est le premier exp'edient que trouvent presque toutes les femmes en pareilles rencontres.
L'Ogre, craignant que sa femme ne f^ut trop longtemps `a faire la besogne dont il l'avait charg'ee, monta en haut pour l’aider. Il ne fut pas moins 'etonn'e que sa femme lorsqu'il vit cet affreux spectacle. "Ah ! qu'ai-je fait l`a ? s''ecria-t-il. Ils me le payeront, les malheureux, et tout `a l'heure. "
Il jeta aussit^ot une pot'ee d'eau dans le nez de sa femme ; et, l'ayant fait revenir: " Donne-moi vite mes bottes de sept lieues, lui dit-il, afin que j'aille les attraper. "
Il se mit en campagne, et apr`es avoir couru bien loin de tous les c^ot'es, enfin il entra dans le chemin o`u marchaient ces pauvres enfants, qui n''etaient plus qu'`a cent pas du logis de leur p`ere. Ils virent l'Ogre qui allait de montagne en montagne, et qui traversait des rivi`eres aussi ais'ement qu'il aurait fait le moindre ruisseau.
Le petit Poucet qui vit un rocher creux proche le lieu o`u ils 'etaient, y fit cacher ses six fr`eres et s'y fourra aussi, regardant toujours ce que l' Ogre deviendrait. L'Ogre, qui se trouvait fort las du long chemin qu'il avait fait inutilement (car les bottes de sept lieues fatiguent fort leur homme), voulut se reposer; et, par hasard, il alla s'asseoir sur la roche o`u les petits garcons s''etaient cach'es. Comme il n'en pouvait plus de fatigue, il s'endormit apr`es s'^etre repos'e quelque temps, et vint `a ronfler si effroyablement, que les pauvres enfants n'eurent pas moins de peur que quand il tenait son grand couteau pour leur couper la gorge.
Le petit Poucet en eut moins de peur, et dit `a ses fr`eres de s'enfuir promptement `a la maison pendant que l'Ogre dormait bien fort, et qu'ils ne se missent point en peine de lui. Ils crurent son conseil, et gagn`erent vite la maison.
Le petit Poucet, s''etant approch'e de l'Ogre, lui tira doucement ses bottes, et les mit aussit^ot. Les bottes 'etaient fort grandes et fort larges ; mais, comme elles 'etaient f'ees, elles avaient le don de s'agrandir et de se rapetisser selon la jambe de celui qui les chaussait; de sorte qu'elles se trouv`erent aussi justes `a ses pieds et `a ses jambes que si elles eussent 'et'e faites pour lui. Il alla droit `a la maison de l'Ogre, o`u il trouva sa femme qui pleurait aupr`es de ses filles 'egorg'ees.