L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— Monsieur, monsieur ! appelait le serviteur.
— Qu’est-ce qu’il y a ?
Il y a des tons de voix auxquels on ne se trompe pas, et le valet de chambre avait parl'e de telle facon que M. Tissot pressentit une mauvaise nouvelle.
— Qu’est-ce qu’il y a, Jean ? Qu’est-ce qui vous prend ?
— Monsieur, r'epondait le domestique qui tremblait de tous ses membres, monsieur, je n’ose pas dire `a monsieur.
— Quoi donc ? mais parlez donc nom d’un chien !
— Il y a, monsieur, il y a un agent.
— Un agent ? Il y a un agent qui veut me voir ? Mais r'epondez-moi donc !
— C’est un accident, monsieur.
— Mon Dieu, un accident ? `A qui ?
Derri`ere le valet de chambre qui se troublait, qui b'egayait, qui n’osait pas r'epondre, plant'e au milieu du salon, M. Tissot apercut un gardien de la paix.
Il fut sur lui en une seconde.
— Qu’est-ce qu’il y a, agent ? Quel accident ?
— Mon Dieu, monsieur, il ne faut pas vous mettre dans des 'etats. Enfin c’est deux jambes cass'ees, voil`a tout. Aussi avec ces maudits taxi-autos. Enfin, monsieur, elle en r'echappera peut-^etre.
— Elle ? qui ? Ma femme ?
— Oui, monsieur, votre
M. Tissot n’entendait plus. Bousculant l’agent au passage, il courait comme un fou `a travers le salon, arrivait dans la galerie juste `a temps pour apercevoir, derri`ere les femmes de chambre qui couraient affol'ees portant des piles de draps, la silhouette d’un infirmier v^etu de blanc qu’il agrippait au passage.
— Ma femme ? r^ala le malheureux. O`u est-elle ?
L’homme se d'egagea :
— Soyez calme, monsieur, recommanda-t-il. Mme Tissot est en bas dans l’ambulance, nous allons la monter.
Mais M. Tissot n’en 'ecoutait pas davantage. Un vertige le prit.
— Quoi ? 'etait-ce possible ? Sa femme venait d’^etre victime d’un accident ? Une ambulance 'etait en bas, on allait la remonter bless'ee, morte peut-^etre.
Affol'e, M. Tissot, une seconde resta immobile, puis, il apercut les portes de la galerie ouvertes `a deux battants, probablement pour faciliter le passage de la civi`ere qu’on allait remonter.
— Ah mon Dieu ! g'emissait le malheureux.
Et, tenant son front `a deux mains, un rictus d’'epouvante sur la physionomie, il courut `a l’escalier. Il descendit aussi vite qu’il le put, pris du besoin de voir, de savoir, de conna^itre toute l’'etendue de son malheur. Sur le trottoir de la rue des Pyramides, une foule stationnait, entourant la voiture d’ambulance municipale, encore herm'etiquement close.
M. Tissot ne distinguait que la silhouette d’une infirmi`ere assise au fond de la voiture, pr`es d’un brancard sur lequel reposait le corps d’une femme, la t^ete entour'ee de linges sanglants.
— Marguerite ! hurla Tissot.
Mais au m^eme moment s’'etant pench'e sur la bless'ee, M. Tissot se rejeta en arri`ere.
— Mais ce n’est pas ma femme ! hurla-t-il. Ce n’est pas Marguerite !
Et comme il hurlait, une main gant'ee se posait sur son 'epaule. Tissot se retourna. Fendant la foule, 'ecartant les curieux, une jeune femme venait d’arriver jusqu’`a lui :
— Qu’est-ce que tu fais-l`a ? Pourquoi m’appelles-tu ? Que se passe-t-il ?
Alors M. Tissot ouvrit des yeux d'emesur'es. Des sons rauques sortirent de sa gorge. Il perdit connaissance. C’'etait sa femme, c’'etait Marguerite qui venait de lui mettre la main sur l’'epaule, Marguerite qui se portait le mieux du monde.
6 – LA CLEF VOL'EE
— Quoi c’est toi ? mais tu n’es donc pas bless'ee ?
— Bless'ee ? pourquoi ? Mais enfin, pourquoi veux-tu que je sois bless'ee ?
M. Tissot, petit `a petit, reprit son sang-froid. Il revint vers l’ambulance, il se pencha sur la bless'ee.
— Je ne connais pas cette femme, dit-il `a l’infirmi`ere. Il y a certainement une erreur.
Et refermant la porti`ere, M. Tissot rentra sous la vo^ute de l’immeuble, suivi par son 'epouse.
Or, au moment o`u M. Tissot traversait le trottoir, il apercevait pr'ecis'ement, d'ebouchant du grand escalier, un infirmier accompagn'e du valet de chambre Jean.
On ouvrait la porte `a deux battants, les hommes semblaient s’appr^eter `a transporter la bless'ee dans l’appartement de M. Tissot.
— Mon ami, d'eclara ce dernier en posant sa main sur l’'epaule de l’infirmier, vous vous ^etes tromp'e, je viens de voir la personne que vous amenez ici. Dieu merci, ce n’est pas ma femme, ma femme est saine et sauve.
La d'eclaration du censeur de la Banque, stup'efia litt'eralement l’infirmier :
— Comment la personne bless'ee n’est pas de la famille de monsieur ?
— Mais nullement.
— Pourtant dans son sac, au poste de police on a retrouv'e une carte donnant l’adresse de la rue des Pyramides.
— Donnant mon adresse ?
— Non 'evidemment, r'epondait l’infirmier, les cartes de dames n’ont jamais l’adresse grav'ee, mais il y avait 'ecrit au crayon
M. Tissot avait mis la main `a son gousset ; il tendit un louis `a l’infirmier en guise de pourboire :
— Il y a erreur, mon ami. Conduisez cette pauvre femme `a l’h^opital, je ne la connais nullement et ma foi je vous avoue que j’en suis heureux.
L’employ'e de l’Assistance publique ne put que saluer respectueusement le censeur de la banque. Il balbutia des excuses :
— Comme monsieur dit, c’est une erreur.
L’homme ajoutait encore quelques vagues paroles dont M. Tissot ne chercha pas `a deviner le sens, tant il 'etait press'e de rejoindre sa femme qui l’avait devanc'e `a l’appartement. M. Tissot, apr`es la violente secousse qu’il venait d’'eprouver go^utait un v'eritable bonheur `a rejoindre son 'epouse :