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Traduit du russe par Daniel M'erino
Rencontre facile
Легкое знакомство
La pi`ece en deux actes
`A PROPOS
Une rencontre entre un homme et une femme a lieu dans le restaurant d’un h^otel, tard le soir. Notons que c’est la femme qui a pris l’initiative de cette rencontre. Il est tr`es difficile de comprendre qui est cette 'etrange inconnue : belle de nuit ou aventuri`ere raffin'ee ? L’homme n’arrive pas `a savoir s’il lui pla^it, si elle joue avec lui ou si elle propose simplement une relation v'enale. Le duel verbal que se livrent ces deux personnages refl`ete une attirance et une r'epulsion mutuelles, leur solitude et leur effort pour la surmonter, le d'esir et la crainte de l’amour. 1 r^ole masculin, 1 r^ole f'eminin
Personnages :
Lui
Elle
ACTE I
La salle de restaurant d’un h^otel, tard dans la soir'ee. Le restaurant est presque vide. Un homme d’^age moyen ach`eve tranquillement son repas, tout en lisant distraitement un manuscrit.
Un peu plus loin, `a une distance de quelques tables, est assise une femme d’une tre_uteau. La femme, de l’air de quelqu’un qui a pris une d'ecision, se l`eve et s’approche de la table de l’homme.
ELLE. Excusez-moi, la place est libre?
L’homme l`eve la t^ete, puis parcourt du regard la salle vide et regarde la femme avec 'etonnement.
ELLE. Je demande si la place est libre.
LUI. Oui, elle est libre.
ELLE. Je peux m’asseoir sur cette chaise?
LUI. (d'ebarrassant sans trop d’entrain son porte-documents de la chaise). Oui, je vous en prie.
La femme s’assoit. L’homme se plonge ostensiblement dans la lecture, faisant des annotations. La femme suspend son sac au dossier de sa chaise, arrange sa coiffure et s’installe confortablement. On sent qu’elle s’appr^ete `a rester longtemps.
ELLE. Excusez-moi, avez-vous des allumettes?
LUI. (interrompant sa lecture). Pardon?
ELLE. Je demande, si vous avez des allumettes ou un briquet.
LUI. Je ne fume pas.
ELLE. Vous prenez soin de votre sant'e?
LUI. Je ne fume pas, tout bonnement.
ELLE.Et vous faites bien. Moi non plus je ne fume pas.
LUI.Pourquoi, alors, demander des allumettes?
ELLE. Je n’en ai pas demand'e. Je voulais simplement savoir si vous en aviez ou pas.
LUI. Admettons, que je n’en aie pas. Et alors?
ELLE. Rien.
LUI. Et si j’en ai?
ELLE. Rien, non plus.
LUI. Une manoeuvre pour engager la conversation?
ELLE. Peut-^etre.
LUI. Consid'erez qu’elle a 'echou'e.
ELLE. Il est d’usage de consid'erer, je ne sais d’ailleurs pas pourquoi, qu’il revient `a l’homme d’engager la conversation.
LUI. S’il le veut.
ELLE. Et vous ne voulez pas?
LUI. Et je ne veux pas.
ELLE. Bon, alors restons sans parler.
L’homme s’efforce `a nouveau de lire le manuscrit. La femme, silencieuse, continue de le regarder.
LUI. (se d'etachant avec agacement de sa lecture). Pourquoi me fixez-vous du regard? Que vous faut-il?
ELLE. Rien. Peut-^etre, vous taquiner un peu.
LUI. Pourquoi?
ELLE. Je ne sais pas. Sans doute, l’ennui.
LUI. Allez vous distraire ailleurs.
ELLE. Vous ne vous ennuyez pas? Vous ne faites que passer dans cette ville qui vous est 'etrang`ere et o`u vous n’avez rien `a faire…
LUI. Pourquoi avez-vous d'ecid'e que je ne fais que passer?
ELLE. Qui d’autre peut rester tard le soir dans un restaurant d’h^otel, seul avec un porte-documents, `a lire un document assommant?
LUI. Et vous me proposez de me divertir?
Elle ne r'epond pas. Pour la premi`ere fois, il jette sur elle un regard attentif, la jaugeant de la t^ete aux pieds.
ELLE. (Suivant son regard, elle se redresse, ajuste les 'epaules et demande, l'eg`erement ironique, tout en esquissant une pose :). Eh bien, cela vous pla^it?
LUI. (avouant malgr'e lui). Pas mal.
ELLE. Merci. Bon, nous pourrions, peut-^etre, faire enfin connaissance?
LUI. Je vous remercie pour cette proposition mais je ne cours pas apr`es les rencontres faciles.
ELLE. Et pourquoi avez-vous d'ecid'e que faire connaissance avec moi sera facile? Je vous promets que cela sera difficile.
LUI. Cela n’aura pas lieu du tout.
ELLE. Cependant, cela est d'ej`a en cours.
LUI. Pas du tout. Je ne vous connais pas et ne veux pas vous conna^itre.
ELLE. Pourquoi ce ton cassant?
LUI. Pour mettre sans attendre les points sur les i. Va aguicher un autre homme. (D’un geste d'ecid'e, il range le manuscrit dans le porte-documents.)
ELLE. Et si je veux vous aguicher, vous, pr'ecis'ement?
LUI. Ne perds pas ton temps, ca ne marchera pas. Les liaisons fortuites, ce n’est pas mon style. De plus, j’aime ma femme.
ELLE. (avec un 'etonnement jou'e). Que dites-vous? Un homme loge `a l’h^otel et avoue `a une femme qu’il est mari'e! Et qu’il aime sa femme! Rare exemple de sinc'erit'e et d’honn^etet'e.
LUI. Quoi qu’il en soit, je suis mari'e, et finissons-en.
ELLE. En quoi est-ce g^enant? Ai-je seulement insinu'e que vous deviez m’'epouser?
LUI. Pour l’instant non, mais `a en juger par ta rapidit'e, peut-^etre ne vas-tu pas tarder `a y faire allusion. (Son regard fait le tour de la salle.) O`u est pass'e ce foutu garcon?
ELLE. (s’asseyant plus confortablement). Je sens que vous n’^etes pas s^ur de votre fermet'e et c’est pourquoi vous me chassez.