L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— Madame, r'ep'etait Juve, d`es cette seconde, vous ^etes sous ma protection. Je ferai tout au monde pour vous sauver.
Juve, en effet, se h^ata de prendre des mesures qu’il jugeait indispensables `a la s'ecurit'e de lady Beltham. Il n’y avait pas d’h'esitation. Pour lui, d’ailleurs, c’'etait bien Fant^omas, et Fant^omas seul, qui pouvait menacer la malheureuse qui venait d’implorer sa piti'e.
— Un homme de la trempe du tortionnaire, songeait Juve, ne recule devant rien. Lady Beltham, sans doute, le g^ene pour une de ses entreprises. Cette femme l’embarrasse de remords perp'etuels. Il aime ailleurs peut-^etre. C’est en tout cas un obstacle sur sa route. Il veut la tuer, c’est logique, c’est naturel de sa part.
Juve, cependant, s’il avait 'et'e sinc`ere avec lui-m^eme, serait convenu d’une autre pens'ee qui, sournoisement, le hantait.
— Fant^omas a ador'e lady Beltham, se disait Juve et lady Beltham s’est `a ce point, d'evou'ee `a Fant^omas, qu’il semble bien difficile d’admettre que le bandit ait pu d'ecider de la tuer, et surtout qu’il ait pouss'e la cruaut'e jusqu’`a l’en pr'evenir `a l’avance par un raffinement dont l’horreur est centupl'ee.
Et Juve se prenait `a esp'erer que, peut-^etre, Fant^omas n’avait voulu qu’effrayer lady Beltham, la d'ecider `a s’enfuir, `a dispara^itre, `a s’'ecarter de sa route.
Fant^omas, d’ailleurs, avait agi curieusement.
Plus Juve 'etudiait les d'etails 'etranges des aventures que lui soumettait lady Beltham, et moins il r'eussissait `a les comprendre. Il y avait dans l’ensemble des faits : le vol de Rose Coutureau, l’annonce de la lettre par une vieille femme, la lettre elle-m^eme, tant de myst`eres qu’il 'etait imprudent de vouloir, en quelques instants, d'ebrouiller l’intrigue emm^el'ee de ces t'en'ebreuses affaires.
— Attendons, se disait Juve, et en tout cas, sauvegardons cette femme.
Un autre que le policier e^ut sans doute, `a cet instant, song'e qu’il 'etait fort possible que toutes les paroles de lady Beltham fussent d’affreux mensonges. Un autre se serait demand'e, sans aucun doute, si lady Beltham ne cherchait pas `a attirer Juve dans un pi`ege quelconque et cela sous l’inspiration de Fant^omas.
Mais Juve n’avait pas cette crainte. Il n’avait m^eme pas pens'e `a cette hypoth`ese.
Non, la douleur de lady Beltham, son effroi, sa peur, 'etaient sinc`eres, r'eels, ce n’'etait pas une femme qui jouait la com'edie qu’il avait devant lui.
Juve, pos'ement, m'ethodiquement, logiquement, interrogeait lady Beltham. Il se faisait d’abord conter avec une minutie extr^eme tout ce que la grande dame pouvait savoir des dangers qu’elle courait. C’'etait si peu de chose que Juve n’en tirait aucun renseignement, et d’ailleurs, au fur et `a mesure que la ma^itresse de Fant^omas lui r'epondait, Juve paraissait de plus en plus pr'eoccup'e :
— Madame, dit enfin le policier, interrompant lady Beltham, j’ai un aveu `a vous faire.
— Lequel, Juve ?
— Celui-ci : je vous ai promis de vous prot'eger, je consid`ere que c’est mon devoir et je n’y faillirai pas. D’autre part, vous m’avez dit vous-m^eme, madame, que votre devoir vous emp^echait de m’aider `a arr^eter Fant^omas. Vous jugez qu’une trahison serait indigne de vous, ce sont bien l`a vos sentiments ?
— Oui, Juve.
— Je le comprends. Eh bien, madame, je dois vous avouer que si je veux r'eellement vous prot'eger, il faut aussi, et ce sera une autre partie de mon devoir, que je t^ache encore et toujours d’appr'ehender votre sinistre amant. Il ne faut pas qu’il y ait d’'equivoque honteuse entre nous, nous ne sommes pas amis, madame, nous pouvons ^etre des ennemis sans haine. Vous comprenez dans quelle situation d'elicate je me trouve ? J’accepte de vous sauvegarder, mais je revendique le droit de continuer `a poursuivre Fant^omas, m^eme et surtout en vous sauvegardant. Acceptez-vous ?
— Sauvez-moi ! r'epondit simplement lady Beltham.
C’'etait presque un abandon que consentait ainsi la ma^itresse de Fant^omas mais comment refuser `a Juve ce qu’il demandait ? Comment le d'etourner de vouloir arr^eter Fant^omas ?
Et puis, lady Beltham, au fond de son coeur, n’avait-elle pas, par moments, un commencement de r'evolte `a l’'egard de celui qu’elle accusait de comploter sa mort ?
Juve, d'esormais, ayant mis en paix sa conscience par l’aveu qu’il venait de faire `a lady Beltham, machinait en grande h^ate une sourici`ere qui devait, infailliblement, amener la capture du bandit.
Il obtint sans grand-peine de M. Havard que l’on m^it quatre agents sous ses ordres :
— Donnez-moi L'eon et Michel avec qui j’ai l’habitude de travailler, demandait Juve. Donnez-moi enfin Nalorgne et P'erouzin, dont l’automobile peut m’^etre pr'ecieuse.
M. Havard ayant laiss'e `a Juve toute latitude pour organiser comme bon lui semblerait l’enqu^ete qu’il s’appr^etait `a mener, le policier se rendait chez lady Beltham, chez la comtesse de Blangy plut^ot, avenue Niel.
— Vous allez commencer, ordonnait Juve, par renvoyer tout votre personnel. Il faut qu’il n’y ait personne ici qui puisse ^etre accus'e de complicit'e.
— Je ferai ce que vous voudrez, Juve.
Lady Beltham 'etait si accabl'ee qu’elle consentit `a tout ce que voulait le policier, avec l’indiff'erence r'eelle de ceux qui vont mourir.
Les domestiques cong'edi'es, Juve employait la nuit du cinq au six, puis encore la journ'ee du six, `a une 'etrange besogne. Aid'e de L'eon et Michel, il sondait minutieusement les murs, le sol de la chambre o`u couchait lady Beltham.
— Fant^omas est capable de tout, murmurait de temps `a autre, le policier, donc il faut se m'efier de tout.
Et Juve ne laissa pas un pouce de muraille inexplor'e. Il s’assurait, avec son habilet'e coutumi`ere, que l’appartement n’'etait pas, ne pouvait pas ^etre truqu'e, m^eme il poussait les pr'ecautions jusqu’`a garnir de planches 'epaisses, de madriers de ch^ene, une des deux portes de la chambre `a coucher de lady Beltham.
— Une porte `a surveiller, disait Juve, c’est d'ej`a beaucoup, c’est d'ej`a bien assez.
La fen^etre, pareillement, fut enclou'ee.
— Madame, disait Juve, c’est un v'eritable si`ege qu’il faut vous attendre `a soutenir, et par cons'equent, il faut renforcer les barricades.