L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Pourtant, le vieil habilleur parlait avec une profonde conviction.
— Oui, disait-il, Fant^omas est une crapule aux yeux de la police, mais moi et ma fille, nous n’avons pas le droit de le consid'erer autrement que comme un sauveur. C’est lui qui a tir'e Rose d’affaire, c’est lui qui l’a emp^ech'ee d’^etre condamn'ee comme voleuse. Tout ce que voudra Fant^omas, je le ferai. Et tout ce qu’il demandera `a Rose, elle le fera.
— Mais bougre de nom d’un chien ! tonna le journaliste. Triple idiot que vous faites ! P`ere Coutureau, vous ne voyez donc pas que Fant^omas s’est proprement pay'e votre figure et celle de votre fille ? Il l’a sauv'ee, c’est possible, mais il ne l’a pas sauv'ee de grand-chose, puisque apr`es tout, la comtesse de Blangy devait retirer sa plainte le lendemain m^eme. Et puis, toutes ces aventures-l`a, ce sont des aventures inqui'etantes, et comment ne comprenez-vous pas que Fant^omas n’a agi de la sorte que pour compromettre votre fille en la m^elant `a l’assassinat de lady Beltham, ce qui probablement lui est d’une utilit'e que nous ne connaissons pas encore.
Le p`ere Coutureau, aux paroles de Fandor, commencait `a h'esiter. Brave homme mais d’esprit peu ouvert, il avait la r'eflexion lente. Ce qu’on lui disait lui semblait vraisemblable, mais, il avait peine `a imaginer que Fant^omas, auquel il vouait un culte depuis quelque temps, 'etait peut-^etre peu digne de son admiration, et m^eme avait peut-^etre cherch'e `a lui nuire et `a nuire `a sa fille.
— Non, mon bon monsieur, r'ep'etait-il, non, s^urement que vous vous trompez. Fant^omas n’a pas d^u vouloir compromettre Rose, et d’ailleurs… d’ailleurs, vous allez bien voir ce qu’en pensent les camarades.
Fandor n’aurait peut-^etre pas voulu mettre ainsi tout le monde du Th'e^atre Ornano au courant de son enqu^ete, mais il ne lui 'etait gu`ere possible de faire taire le p`ere Coutureau qui, tr`es excit'e, `a la fois 'epouvant'e et incr'edule, ne savait que penser.
— 'Ecoutez, disait le brave homme, 'ecoutez ! Voil`a monsieur qui pr'etend que Fant^omas, Fant^omas, vous le savez bien, qui a sauv'e Rose l’autre jour, va pr'ecis'ement la compromettre dans l’histoire de l’assassinat de Mme de Blangy.
`A ces mots, surprise g'en'erale.
Bavard, le p`ere Coutureau avait depuis longtemps cont'e les aventures de Rose `a tout le monde au th'e^atre. On 'etait donc au courant et l’on ne se privait point de mal juger les affirmations de Fandor, personnage d’autant plus suspect que personne ne le connaissait, que personne ne savait d’o`u il venait.
— Allez, allez, disait un machiniste, ne t’occupe pas de ce que jaspine monsieur, tout ca c’est des histoires ! Ce qu’il y a de s^ur, c’est que ta fille allait faire de la taule et que, gr^ace `a Fant^omas, elle n’en a pas fait. Tu n’as `a savoir que ca.
C’'etait l’opinion g'en'erale.
Dick, lui-m^eme, qui 'etait entr'e dans le bar par hasard, approuvait les paroles du machiniste :
— Je ne vois pas tr`es bien, d'eclarait-il, pourquoi Fant^omas aurait pris la peine de sauver Rose Coutureau, qu’il ne connaissait pas encore, si c’'etait son intention de la compromettre ensuite. Et puis, d’ailleurs, rien ne prouve que ce soit Fant^omas qui ait r'eellement tu'e avenue Niel. Les journaux le soupconnent, c’est vrai. Mais enfin, les journaux ne sont pas infaillibles.
Fandor, sous ce flot d’arguments, devant l’hostilit'e g'en'erale, n’insista pas. Il 'ecoutait les conversations, nota de petits d'etails dans l’espoir continuel de surprendre quelque indice int'eressant, puis, comprenant que tous les gens qu’il avait devant lui ne savaient rien, ou, qu’en tout cas, ils ne voulaient rien dire, il paya son d^u et se leva :
— P`ere Coutureau, dit le journaliste, je ne doute pas que vous soyez de bonne foi, mais assur'ement vous ne vous rendez pas compte des dangers qui menacent votre fille, et vous aussi peut-^etre. Fant^omas jouant `a l’homme de bien, cela ne s’est jamais vu. Prenez garde, prenez garde !
Et Fandor s’'eloigna sur ces paroles qui troubl`erent le p`ere Coutureau, et cr'e`erent un vrai malaise chez ceux qui les entendirent.
***
Entr'e dans la chambre de lady Beltham, cette chambre dont il avait sond'e les murailles, dont il avait m'eticuleusement assur'e la protection en bouchant la fen^etre, en barricadant les portes, en guettant continuellement l’unique entr'ee qu’il avait laiss'ee subsister, Juve avait apercu couch'e sur le lit de milieu le corps de lady Beltham.
Le policier, d’abord, de stup'efaction, s’'etait immobilis'e au centre de la pi`ece, puis une col`ere folle, un d'esespoir furieux aussi s’'etaient empar'es de lui.
Juve s’'etait 'elanc'e, il avait couru jusqu’au lit, il s’'etait pench'e sur le corps. Un rauque juron s’'etait 'echapp'e de ses l`evres :
— Ah nom de Dieu ! Morte !
Et tout de suite apr`es, alors qu’un frisson d’'emotion le secouait, Juve avait ajout'e :
— Tu'ee, c’est 'evident. Mais tu'ee comment ?
Juve, alors, retrouvait le sang-froid dont il avait `a maintes reprises donn'e des preuves si extraordinaires.
Juve avait l’^ame faite de cette facon que les difficult'es et les myst`eres, loin de l’abattre, loin de le d'esesp'erer, le surexcitaient au contraire, infusaient une nouvelle ardeur `a son 'energie.
— Ah c`a, c’est incompr'ehensible ! grogna-t-il. Personne n’est rentr'e ici, cependant, depuis hier soir.
Et Juve ordonna :
— L'eon, restez debout devant la porte et emp^echez quiconque d’entrer ! Michel, venez m’aider !
La mort de lady Beltham apparaissait `a l’esprit du policier comme le myst`ere le plus incompr'ehensible, le plus inexplicable qu’il ait eu jamais `a 'elucider.
La pi`ece o`u lady Beltham venait d’^etre assassin'ee – Juve en avait la persuasion, la certitude absolue, indiscutable – 'etait herm'etiquement close. Lady Beltham y 'etait entr'ee la veille, bien portante, personne n’avait pu s’y introduire, et pourtant, elle venait de mourir.
— Qu’a-t-il donc pu se passer ? se demandait Juve.