L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— `A la Pr'efecture, ordonna J'er^ome Fandor.
23 – EN RETARD
— Les cigarettes sont vraiment d’excellentes choses qui ne sont surpass'ees au monde que par les cigares, lesquels c`edent eux-m^emes le pas devant la pipe, nectar supr^eme. D'ecid'ement, je vais ^etre en retard !
Dick 'etait chez lui. Il 'etait tout pr`es de huit heures et demie `a la pendule qui ornait la chemin'ee de sa chambre, et, tout en fumant des cigarettes, il se livrait aux plus agr'eables sp'eculations, car il supputait d’avance le gain qu’allait lui valoir une tourn'ee projet'ee. Dick ne se d'ecidait pas `a quitter son logis bien confortable pour se rendre au Th'e^atre Ornano, o`u il devait cependant, ce soir-l`a comme tous les jours, aller tenir son r^ole.
— On est vraiment bien chez soi, b^ailla le jeune homme. Sapristi, que c’est emb^etant de s’habiller, de descendre dans la rue, de trotter jusqu’au th'e^atre, le tout pour aller r'eciter une pi`ece idiote, 'ecrite par un auteur stupide. Enfin ! En attendant que je sois millionnaire…
Vainquant sa paresse, Dick venait de se lever. Il s’'etira les bras avec une profonde conviction, il b^ailla encore, regardant machinalement la pendule.
— Huit heures et demie, hum j’ai juste le temps. Il faut que je sois `a neuf heures et quart au th'e^atre. Bah, je prendrai l’autobus jusqu’au boulevard et la baladeuse [36].
`A ce moment, Dick tressaillit violemment :
— Ah nom de nom !
Au lointain calme des Batignolles, une horloge tintait.
— Parbleu, ma sacr'ee pendule retarde, se d'eclara l’acteur, j’ai neuf heures moins vingt-cinq et voil`a, neuf heures qui sonnent.
Machinalement, il compta les coups sonn'es `a l’'eglise voisine et soudain, son attitude changea encore :
— Sept… huit… neuf… dix… dix heures ! ah c`a, Bon Dieu, mais qu’est-ce que cela veut dire ?
L’acteur sauta litt'eralement dans une pi`ece voisine, bondit vers une petite table sur laquelle il avait pos'e sa montre :
— Sacr'e nom d’un chien, s’il est v'eritablement dix heures…
La montre marquait huit heures et demie.
— Ouf, soupira Dick, j’ai eu chaud. Parbleu c’est tout simplement l’horloge de l’'eglise qui avance, et j’ai l’heure exacte ici.
Il retomba `a son calme profond, et lentement, avec la paresse d’un homme qui va se rendre `a une besogne qui ne l’enthousiasme gu`ere, il commenca `a choisir un faux-col, une paire de manchettes, `a brosser son chapeau.
Or, tandis qu’il se livrait `a ces pr'eparatifs, l’acteur Dick bl^emit encore une fois.
— Mais nom de nom !
`A quelques minutes d’intervalle, dans l’air calme de la nuit, une seconde horloge sonnait.
Dick reconnut le timbre, c’'etait l’horloge d’un pensionnat voisin.
— Comment sonne-t-elle une heure ? Ce devrait ^etre une demie ?
Et il se reprit `a compter les coups :
— Sept… huit… neuf… dix…, mais bon Dieu. Il est donc dix heures ?…
Immobile au milieu de sa chambre, tenant un faux-col dont il ouvrait les boutonni`eres, Dick faisait une vilaine grimace :
— Eh bien, me voil`a frais ! C’est du joli ! Mon r^ole me fait entrer en sc`ene dans vingt minutes, je ne serai jamais au th'e^atre.
Et, machinalement encore, il regarda sa montre, la pendule de la chemin'ee, et qui, toutes deux, indiquaient neuf heures moins quelques minutes.
— C’est insens'e, grognait Dick, qui croire ? Mes ustensiles ou ceux du public ?
Dick eut une inspiration.
Traversant son logement, il alla ouvrir la fen^etre d’une 'etroite cuisine qui donnait sur une cour en forme de puits et toute sale, toute suintante d’humidit'e.
— Eh madame la concierge, h'e l`a !
Il appelait `a pleins poumons, sans la moindre vergogne, car, depuis longtemps il avait invent'e de se servir de la cour comme d’un gigantesque porte-voix lorsqu’il avait une communication `a faire `a la digne concierge de son immeuble qui lui servait de femme de m'enage.
Mais Dick, d’abord, n’obtint pas de r'eponse ; alors il s’emporta.
— M’entendez-vous, pipelette de malheur ?
Une voix de vieille femme, une voix tremblante, interrogeait :
— Quoi qu’il y a, monsieur Dick ?
— Quelle heure est-il ?
— Dix heures, monsieur Dick ! Vous n’allez donc pas au th'e^atre ?
La concierge recut en plein visage, lanc'e par son locataire furieux un mot bref, pr'ecis, qui ressemblait fort au mot historique de Cambronne.
Dick, d’ailleurs, referma sa fen^etre avec rage.
— Coquin de sort, jurait-il, bougre de nom d’un chien ! Ah, saloperie ! Et dire que mon r^ole n’est pas doubl'e. Qu’est-ce que je vais ramasser comme amende.
Il se pr'ecipita.
— Avec un sapin encore, un taxi-auto, je pourrai peut-^etre arriver. Et la client`ele, l`a-bas, qui n’est pas commode… Toutes les oranges du quartier vont assur'ement s’aplatir contre le rideau.
En jurant, en grognant, quatre `a quatre, Dick s’habilla. Il s’agissait bien vraiment de mettre un faux-col ou des manchettes propres. Jetant ses affaires `a la vol'ee, sacrant, pestant, l’acteur changeait de costume un peu au hasard, enfilait ses bottines. En trois minutes il 'etait `a peu pr`es pr^et.
— Mon fard, sapristi, o`u est mon fard ?
La veille, Dick manquait de blanc gras au th'e^atre, il en avait achet'e, il avait pos'e la bo^ite sur la tablette de sa table de toilette.
En courant, Dick se pr'ecipita pour prendre le bienheureux fard.
Mais il 'etait dit que l’acteur, ce soir-l`a, jouait de malheur.
`A peine entrait-il en effet dans son cabinet de toilette qu’une v'eritable catastrophe se produisit :
Dick n’avait pas fait deux pas qu’il recevait en pleine poitrine, un formidable jet d’eau, un jet comparable `a celui qu’e^ut fait un tuyau sous pression 'eclatant `a l’improviste.