Le Cadavre G?ant (Гигантский кадавр)
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Fant^omas, `a son tour, y grimpait, et, `a l’instant o`u J'er^ome Fandor faisait enfin feu, l’automobile d'emarrait.
— Au revoir ! criait narquoisement Fant^omas.
Le G'enie du crime pensait 'evidemment, en cet instant, triompher facilement de Fandor, et lui 'echapper sans la moindre difficult'e.
Il lui fallait, toutefois, mal conna^itre le journaliste pour imaginer qu’il 'etait capable de renoncer si facilement `a une poursuite de pareille importance.
`A l’instant o`u la voiture d'emarrait, Fandor se jetait en avant, faisant un v'eritable bond.
Certes, il ne pouvait rejoindre Fant^omas, mais il arrivait `a s’agripper `a la capote de la voiture ; il sautait sur les ressorts, s’agenouillait sur le r'eservoir, et cela pendant que l’engin filait `a une allure folle.
— Je le tuerai s’il le faut, pensait Fandor. Mais, je ne le laisserai pas partir ainsi !
En d'epit de sa situation vertigineuse, en d'epit des cahots de la voiture, qui menacaient `a chaque minute de le faire rouler sur la chauss'ee, Fandor, en effet, braquait son browning et visait Fant^omas qui, pench'e au volant, 'etait `a moins d’un m`etre de lui.
En 'etait-ce fait du bandit ?
H'elas, `a ce moment, brusquement, Bec-de-Gaz se dressait dans la voiture.
OEil-de-Boeuf et Bec-de-Gaz, en effet, `a l’instant o`u Fant^omas d'emarrait, avaient 'et'e jet'es l’un contre l’autre et Fandor, une seconde, les avait oubli'es.
Or, OEil-de-Boeuf, se redressant, apercevait tout naturellement Fandor cramponn'e `a la capote. L’apache alors ne perdait point de temps : d’un violent coup de poing, il d'etournait le bras du journaliste, dont le coup de feu demeurait vain, puis, f'eroce, d’autant plus brutal que Fandor, dans la position o`u il 'etait, ne pouvait pas lutter, il ass'enait sur la t^ete du malheureux de terribles coups de poings.
Aveugl'e, 'etourdi, le visage en sang, J'er^ome Fandor cette fois l^achait prise.
Et tandis qu’all'eg'ee, la voiture bondissait plus vite encore, J'er^ome Fandor roulait sur le sol, faisant une chute effroyable mais qui, par bonheur, n’'etait point mortelle, car le journaliste tombait de fort bas, les ressorts de la voiture 'etant `a peine `a quatre-vingts centim`etres du sol.
'Etait-ce donc l`a le dernier 'episode de la lutte acharn'ee qui mettait aux prises Fandor et Fant^omas depuis une journ'ee enti`ere ?
Non !
J'er^ome Fandor, tomb'e sur le sol, avait encore l’'energie surhumaine de faire un geste : il tendait le bras, il visait la voiture, il faisait feu…
Quand Bouzille arrivait `a son secours, Fandor d'ej`a se levait et d'ej`a se tra^inait en avant.
Deux minutes plus tard, `a Bouzille, effar'e, J'er^ome Fandor expliquait :
— Les mis'erables !… Ils m’ont encore gliss'e dans les doigts… Mais ca ne fait rien, je les tiens !
Or, `a cet instant, la figure de Bouzille exprimait la plus totale incompr'ehension.
— Vous les tenez ? demandait le chemineau. Comment diable les tenez-vous ?
— Parce qu’ils vont ^etre forc'es de s’arr^eter.
— Pourquoi, m’sieur Fandor ?
— Parce que, Bouzille, dans dix kilom`etres tout au plus, il ne leur restera pas une goutte d’essence.
Bouzille ouvrait des yeux ronds, se demandant si Fandor ne d'eraisonnait pas, mais le journaliste le rassurait :
— Bouzille, quand je suis tomb'e, expliquait-il encore, j’ai pens'e `a tirer sur la voiture, et j’ai crev'e le r'eservoir d’essence. `A l’heure actuelle, leur provision s’'epuise : je calcule qu’ils seront en panne dans dix kilom`etres au plus tard…
— Hardi, Bouzille, presse le pas !
— Sauf vot’respect, m’sieur Fandor, c’est plut^ot vous qui marchez comme une canne qui pondrait ses oeufs en s’baladant !
— Ne parle pas, Bouzille, d'ep^eche-toi !
— Mais j’me d'ep^eche, m’sieur Fandor ! Et puis, c’est pas pour dire, mais trente sous du kilom`etre que vous m’donnez, pour vous servir de b'equille, l`a, vrai, c’est pas pay'e…
— Je te donnerai quarante sous, Bouzille.
— Alors, on va galoper.
La journ'ee s’achevait. Il y avait une demi-heure que la fuite de Fant^omas s’'etait r'ealis'ee, et Fandor et Bouzille avancaient le long de la grande route, se h^atant vers une destination inconnue.
Fandor, sit^ot le drame, avait envoy'e Bouzille aux renseignements. Il estimait que Fant^omas serait en panne au bout de dix kilom`etres, et il voulait `a toute force savoir en quel endroit se trouverait Fant^omas dix kilom`etres plus loin.
Bouzille avait 'et'e interroger la garde-barri`ere et revenait trouver Fandor qui l’attendait sur la route.
— Voil`a, d'eclarait-il : para^it que dans six kilom`etres, m’sieur Fandor, on s’trouve `a une station du chemin de fer, une halte, comme qui dirait, o`u les rapides s’arr^etent tout juste, rapport `a un d'eput'e qui est influent.
Fandor, en 'ecoutant cela, devenait bl^eme de rage.
Ainsi, le hasard allait encore servir Fant^omas !… Six kilom`etres plus loin, `a l’instant o`u, fatalement, le bandit se serait apercu qu’il allait ^etre en panne, il aurait la chance de trouver un train dans lequel embarquer pour s’enfuir…
— Nom de Dieu !… jura Fandor.
Et, haletant, il interrogea Bouzille :
— Tu n’as pas demand'e si un rapide passait prochainement ?
— Si fait, m’sieur Fandor, para^it qu’y en a un dans trente-cinq minutes.
— Dans trente-cinq minutes !
Et J'er^ome Fandor se mordit les l`evres au sang. Dans trente-cinq minutes, Fant^omas serait tranquillement arriv'e `a la gare. Or, dans trente-cinq minutes, J'er^ome Fandor, lui, perdu en cette campagne d'eserte, sans moyen de transport, souffrant d’une entorse, ne pouvait pas esp'erer couvrir les six kilom`etres…