L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— Ce qu’il faut, conclut-il, c’est conna^itre l’origine de ces billets. Je vais de ce pas `a la maison Rivel soeurs.
Mais le policier dut diff'erer son d'epart. Le secr'etaire de M. Havard venait d’entrer dans le cabinet de son chef et annoncait :
— Les inspecteurs que vous avez envoy'es en mission sont de retour. Ils rapportent quelques renseignements. Voulez-vous les entendre ?
— Certainement, fit le chef de la S^uret'e, envoyez-les moi s'epar'ement.
Juve enlevait son pardessus :
— Vous permettez que je reste ? demanda-t-il.
— Comment donc.
Quelques instants apr`es, L'eon s’introduisait dans le cabinet du chef :
— Vite, d'ep^echez-vous ! ordonna M. Havard. Racontez-nous ce que vous savez.
— Peu de chose, fit L'eon, si ce n’est que les billets suspects sont de plus en plus fr'equemment livr'es `a la circulation. J’en ai d'ecouvert dans les restaurants du bois de Boulogne. Le pari mutuel aux courses d’Auteuil, hier, en a 'et'e inond'e.
M. Havard levait les bras au ciel :
— C’est extraordinaire, fit-il que le voleur ait eu l’audace de r'epandre ainsi le produit de son vol, d`es le lendemain. Il devait bien se douter que nous allions agir, surveiller…
Juve haussa les 'epaules :
— S’il proc`ede de la sorte, ce n’est point par imprudence, ni maladresse, mais bien au contraire parce qu’il se croit s^ur de l’impunit'e. Et ce proc'ed'e qui consiste `a nous narguer est bien un proc'ed'e `a la Fant^omas.
Juve, toutefois, s’arr^eta net de monologuer, pour poser `a L'eon cette question :
— Le pari mutuel, avez-vous dit, 'etait inond'e, hier, de ces billets. O`u les trouvait-on ? `A la pelouse ou au pesage ?
L'eon r'epondit nettement :
— Quelques-uns `a la pelouse, 'evidemment, mais la majorit'e, pour ne pas dire la quasi totalit'e, se trouvait au pesage.
Juve parut satisfait de cette r'eponse, et comme se parlant `a lui-m^eme, il murmura :
— Monde chic [11].
L'eon cependant, avait fini. Il remit `a M. Havard son rapport 'ecrit, puis c'eda la place `a son coll`egue Michel. Celui-ci exposa :
— Conform'ement aux instructions que j’ai recues, monsieur le chef de la S^uret'e, j’ai effectu'e ma surveillance dans toutes les maisons de commerce susceptibles de faire des 'echanges fr'equents de grosses sommes d’argent. J’ai battu le quartier de l’avenue de la Grande-Arm'ee et j’ai relev'e dans les caisses de certains commercants, apr`es leur avoir fait conna^itre ma qualit'e, les renseignements suivants : le fleuriste de la rue Duret, dont voici le nom et l’adresse exacts, avait neuf billets suspects dans sa caisse sur douze billets ; trois garages d’automobiles de l’avenue des Ternes en avaient chacun quatre sur cinq ; huit sur neuf billets en caisse. J’ai encore quelques observations de ce genre qui sont consign'ees dans mon rapport. Dans l’apr`es-midi d’hier et la matin'ee d’aujourd’hui, j’ai fait les quartiers du centre et les grands magasins. J’ai bien trouv'e quelques billets, mais dans une proportion insignifiante, compar'ee `a celle que je viens de vous indiquer.
Cependant que M. Havard demeurait perplexe, Juve hocha la t^ete, approuva.
— Bien, tr`es bien, fait-il.
Et il semblait si satisfait que M. Havard l’interrogea :
— On dirait, Juve, que vous tirez une conclusion int'eressante de ces renseignements ?
Mais le policier ne voulait 'evidemment rien communiquer encore `a son chef. Il secoua la t^ete.
— Pas le moins du monde, dit-il, j’ai simplement constat'e – et je vous le r'ep`ete – que les billets suspects semblent avoir 'et'e r'epandus dans les quartiers de l’Ouest de Paris et semblent ^etre d'etenus, soit par des gens chics comme il s’en trouve au pesage, soit par des commercants qui ont des commerces de luxe, comme les fleuristes, les garages d’automobiles.
Peut-^etre M. Havard allait-il poursuivre ses questions, lorsque Michel, s’'etant retir'e, deux personnages aux allures burlesques s’introduisirent dans son cabinet.
Juve sourit en les voyant, cependant que M. Havard froncait les sourcils.
— En voil`a une tenue pour vous pr'esenter devant moi ! s’'ecria-t-il.
Les deux hommes, en effet, arrivaient couverts de poussi`ere, v^etus de v^etements luisants de cambouis, avec des mains sales, des chevelures d'epeign'ees.
— Excusez-moi, monsieur le chef de la S^uret'e, murmura l’un d’eux, mais il a fallu r'eparer un pneu et le carburateur, au coin de la rue de Rivoli.
C’'etait l’ineffable P'erouzin qu’accompagnait le surprenant Nalorgne. Les deux inspecteurs qui faisaient la joie de la police parisienne et que l’on gardait `a la S^uret'e, nul ne savait exactement pourquoi, arrivaient cependant avec des mines si triomphantes que M. Havard esp'era un instant qu’ils avaient quelque chose d’int'eressant `a lui dire.
Nalorgne, en effet, entreb^aillait son veston de cuir, en sortait un portefeuille crasseux dont il retirait trois billets de banque :
— Ah, constata le chef de la S^uret'e, vous avez saisi ces billets ?
— Oui, monsieur le chef de la S^uret'e, r'epliqua hardiment P'erouzin.
Nalorgne, cependant, rectifiait :
— Saisi n’est pas le mot.
— Je l’esp`ere bien, poursuivit M. Havard. Je vous avais donn'e, en effet, pour instructions, de ne pas vous emparer de ces sommes, ni m^eme des billets. Votre r^ole 'etait simplement de savoir qui les poss'edait. D’o`u vous viennent ces billets ?
— Ah voil`a, fit P'erouzin, c’est ce que nous nous demandons tous les deux. Et c’est ce qui est difficile `a retrouver.
Les deux inspecteurs avaient maintenant une mine si piteuse que, tandis que M. Havard froncait de plus en plus les sourcils, Juve se pincait les l`evres pour ne pas 'eclater de rire.
Nalorgne et P'erouzin racont`erent alors une histoire confuse, aux termes de laquelle ils exposaient que, par suite des diverses pannes de leur automobile, ils avaient 'et'e oblig'es de faire des d'epenses en cours de route. Or, dans l’ardeur de la poursuite, ils avaient fait de la monnaie, 'echang'e de l’or contre des billets, tant et si bien qu’ils ne se souvenaient plus exactement d’o`u provenaient les trois coupures de cent francs qu’ils venaient d’apporter `a leur chef hi'erarchique.