La main coup?e (Отрезанная рука)
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Les deux jeunes gens n’avaient eu que le temps de se dissimuler.
L’instant d’apr`es, ils entendaient rouler au-dessus de leurs t^etes l’automobile myst'erieuse dont la poursuite les menacait. Puis la voiture s’arr^eta, quelqu’un descendit. Ils entendirent vaguement une conversation.
On les cherchait. Si les poursuivants s’avisaient de soulever cette plaque de fer…
Mais au bout de quelques secondes d’'emotion, ils reprirent confiance et courage.
Ils entendirent, en effet, l’automobile tourner, le m'ecanicien passer ses changements de vitesses. Peu `a peu les ronflements du moteur s’att'enuaient.
La voiture 'etait partie, mais quelqu’un restait-il `a proximit'e pour les 'epier, pour les surprendre au bon moment ?
Pendant pr`es d’un quart d’heure, ils demeur`erent immobiles, retenant leur souffle, 'ecoutant.
Toujours aucun bruit. Fandor le premier d'ecida de sortir de la cachette.
Lentement, il souleva la plaque, passa la t^ete, regarda autour de lui.
Ne voyant rien, le journaliste s’enhardit, remonta l’escalier, offrant la main `a la fille de Fant^omas qui d’ailleurs n’h'esita pas `a la prendre.
Les deux jeunes gens 'etaient revenus `a la surface du sol.
— Pour vous, mademoiselle, dit Fandor, j’ai consenti `a me dissimuler. Mais peut-^etre ai-je perdu une belle occasion de m’emparer de Fant^omas.
— Fant^omas, qui nous prouve que c’'etait lui et pourquoi ne serait-ce pas Juve ou quelque autre policier ? dit la jeune fille.
— Juve, s’'ecria Fandor, mais j’imagine qu’il doit ^etre encore au Casino : qu’il poursuit son enqu^ete sur l’assassinat de Louis Meynan.
La fille de Fant^omas parut atterr'ee.
— Louis Meynan, s’'ecria-t-elle, est mort ?
— Il est mort, r'epliqua Fandor, c’est le dernier crime de Fant^omas. Le plus r'ecent du moins.
— Le plus r'ecent, puissiez-vous dire vrai.
— Vous savez quelque chose ?
— Peut-^etre, avoua la fille de Fant^omas.
Puis, soudain, son visage redevint dur et elle ajouta :
— Et si cet autre crime s’est produit, la responsabilit'e vous en incombera.
— Pourquoi ?
— J’allais peut-^etre emp^echer un malheur d’arriver lorsque vous vous ^etes jet'e `a mes trousses.
— Il fallait me le dire, s’'ecria Fandor, je vous aurais aid'ee.
La fille de Fant^omas eut un amer sourire :
— Vous m’auriez aid'ee, sans doute, c’est possible, mais il ne fallait pas que vous sachiez. Il ne fallait pas que vous puissiez approcher du coupable, cela, jamais, non jamais je ne vous le faciliterai.
— Ah, g'emit Fandor, c’est encore Fant^omas qui a tu'e. Toujours Fant^omas.
La jeune fille ne r'epliqua rien. Elle paraissait trop 'emue.
Apr`es un silence, elle ajouta pourtant :
— Fant^omas n’est pas le seul suspect `a vos yeux, et surtout aux yeux de vos amis.
— C’est vrai, r'epandit pensivement Fandor, je sais que certains vous soupconnent.
— Il ne s’agit pas de moi. Je compte si peu et je saurai toujours me tirer d’affaire. Mon sort n’est pas int'eressant ou du moins il ne doit pas vous int'eresser. Celui dont j’ai voulu vous parler, c’est Ivan Ivanovitch.
— Mais je puis vous certifier qu’Ivan Ivanovitch – en admettant qu’il ait 'et'e coupable, ce dont je doute – n’a pu commettre aucun crime ce soir.
— Et pourquoi cela ?
— Parce qu’il est mon prisonnier.
— Vous perdez la t^ete, Fandor, c’est impossible.
— C’est tellement vrai, d'eclara le journaliste, qu’il y a une heure `a peine, au moment pr'ecis o`u je vous rencontrais, je sortais de la tani`ere de Bouzille, `a quelque cent m`etres d’ici et que je venais d’y laisser, dans cette tani`ere, Ivan Ivanovitch ligot'e de mes propres mains et sous la garde du chemineau.
Celle qui dans la famille H'eberlauf s’'etait fait conna^itre sous le nom de Denise, `a la d'eclaration que lui faisait Fandor, ouvrit des yeux de plus en plus 'ebahis :
— Est-ce vrai, Fandor ? est-ce vrai ? jurez-le moi, fit-elle.
Et comme le journaliste le r'eaffirmait :
— Bravo, laissa 'echapper la fille de Fant^omas, ce que vous avez fait l`a est superbe.
Mais elle ajoutait aussit^ot :
— Il faut le rel^acher. Allez le remettre en libert'e. D'ep^echez-vous.
— Mais pourquoi donc faut-il que je l^ache Ivan Ivanovitch ? Avez-vous des raisons d’avoir peur pour lui ?
La fille de Fant^omas se rapprocha de Fandor, elle lui parla de pr`es, de tout pr`es :
— Il ne faut pas qu’Ivan Ivanovitch soit trouv'e par Juve. Ce serait 'epouvantable.
— Pourquoi ?
— Parce que Juve le tuerait.
Fandor, interloqu'e, ne trouva rien `a r'epondre. Cependant que la fille de Fant^omas poursuivait :
— C’est bien Ivan Ivanovitch que vous avez fait prisonnier ? le commandant du Skobeleff, celui-l`a m^eme que vous avez rencontr'e dans les jardins du Casino, qui vous a fait, ces jours derniers, appr'ehender par les marins de sa baleini`ere ?
— Mais, dame, 'evidemment.
La jeune fille posa encore quelques questions, puis, voyant Fandor de plus en plus convaincu de l’exactitude de ses dires, elle poussa un soupir de satisfaction.
— Vous avez raison, fit-elle, et je suis folle de m’inqui'eter ainsi. Cet officier peut rester votre prisonnier et m^eme si Juve s’en empare, il ne lui arrivera pas de mal.