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Том 3. Публицистические произведения
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L’immortel honneur du Souverain qui est maintenant sur le tr^one de Russie, c’est de s’^etre fait plus pleinement, plus 'energiquement qu’aucun de ses devanciers le repr'esentant intelligent et inflexible de ce droit, de cette l'egitimit'e historique. Une fois que son choix a 'et'e fait, l’Europe sait si depuis trente ans la Russie y est rest'ee fid`ele. On peut affirmer, l’histoire `a la main, qu’il serait bien difficile de trouver dans les annales politiques du monde un second exemple d’une alliance aussi profond'ement morale que celle qui unit depuis trente ans les souverains de l’Allemagne `a la Russie, et c’est ce grand caract`ere de moralit'e qui l’a fait durer, qui l’a aid'ee `a r'esoudre bien des difficult'es, `a surmonter bien des obstacles, et maintenant, apr`es l’'epreuve des bons et des mauvais jours, cette alliance a triomph'e d’une derni`ere 'epreuve, la plus significative de toutes: l’inspiration qui l’avait fond'ee s’est transmise, sans choc et sans alt'eration, des premiers fondateurs `a leurs h'eritiers.

Eh bien, monsieur, demandez `a vos gouvernements si depuis ces trente ann'ees la sollicitude de la Russie pour les grands int'er^ets politiques de l’Allemagne s’est d'ementie un seul instant? Demandez aux hommes qui ont 'et'e dans les affaires si maintes fois et sur bien des questions cette sollicitude n’a pas devanc'e vos propres inspirations patriotiques? Vous voil`a depuis quelques ann'ees vivement pr'eoccup'es en Allemagne de la grande question de l’unit'e germanique. Il n’en a pas toujours 'et'e ainsi, vous le savez. Moi qui depuis longtemps demeure parmi vous, je pourrais au besoin me rappeler l’'epoque pr'ecise o`u cette question a commenc'e `a passionner les esprits; assur'ement il 'etait peu question de cette unit'e, au moins dans la presse, `a l’'epoque o`u il n’y avait pas de feuille lib'erale qui ne se cr^ut oblig'ee en conscience de saisir chaque occasion d’adresser `a l’Autriche et `a son gouvernement les m^emes injures que l’on prodigue maintenant `a la Russie… C’est donc l`a une pr'eoccupation tr`es louable, tr`es l'egitime `a coup s^ur, mais d’une date assez r'ecente. La Russie, il est vrai, n’a jamais pr^ech'e l’unit'e de l’Allemagne; mais depuis trente ans elle n’a cess'e dans toutes les occasions et sur tous les tons de recommander `a l’Allemagne l’union, la concorde, la confiance r'eciproque, la subordination volontaire des int'er^ets particuliers `a la grande cause de l’int'er^et g'en'eral, et ces conseils, ces exhortations, elle ne s’est pas lass'ee de les reproduire, de les multiplier, avec toute cette 'energique franchise d’un z`ele qui se sait parfaitement d'esint'eress'e.

Un livre qui a eu, il y a quelques ann'ees, un grand retentissement en Allemagne et auquel on a bien faussement attribu'e une origine officielle, a sembl'e accr'editer parmi vous l’opinion que la Russie, `a une certaine 'epoque, aurait eu pour syst`eme de s’attacher plus particuli`erement les Etats allemands de second ordre au pr'ejudice de l’influence l'egitime des deux grands Etats de la Conf'ed'eration. Jamais la supposition n’a 'et'e plus gratuite, et m^eme, il faut le dire, plus contraire de tout point `a la r'ealit'e.

Consultez l`a-dessus les hommes comp'etents, ils vous diront ce qui en est; peut-^etre vous diront-ils que dans sa constante pr'eoccupation d’assurer avant tout l’ind'ependance politique de l’Allemagne, la diplomatie russe s’est expos'ee quelquefois `a froisser d’excusables susceptibilit'es, en recommandant avec trop d’insistance aux petites cours d’Allemagne une adh'esion `a toute 'epreuve au syst`eme des deux grandes puissances. Ce serait peut-^etre ici le lieu d’appr'ecier `a sa juste valeur une autre accusation mille fois reproduite contre la Russie et qui n’en est pas plus vraie. Que n’a-t-on pas dit pour faire croire que c’est son influence avant tout qui a contrari'e en Allemagne le d'eveloppement du r'egime constitutionnel? En th`ese g'en'erale il est souverainement d'eraisonnable de chercher `a transformer la Russie en adversaire syst'ematique de telle ou telle forme de gouvernement; et comment, grand Dieu, serait-elle devenue ce qu’elle est, comment exercerait-elle sur le monde l’influence qui lui appartient, avec une pareille 'etroitesse de ses id'ees! Ensuite, dans le cas sp'ecial dont il s’agit, il est rigoureusement vrai de dire que la Russie s’est toujours 'energiquement prononc'ee pour le maintien loyal des institutions 'etablies, pour le respect religieux des engagements contract'es; apr`es cela il est tr`es possible qu’elle ait pens'e qu’il ne serait pas prudent, dans l’int'er^et le plus vital de l’Allemagne (celui de son unit'e) de donner dans les Etats constitutionnels de la Conf'ed'eration `a la pr'erogative parlementaire la m^eme extension qu’elle a, par exemple, en Angleterre, en France; que si, m^eme `a pr'esent, il n’'etait pas toujours facile d’'etablir entre les Etats cet accord, cette intelligence parfaite, que n'ecessite une action collective, le probl`eme deviendrait tout bonnement insoluble dans une Allemagne domin'ee, c’est-`a-dire divis'ee par une demi-douzaine de tribunes parlementaires souveraines. C’est l`a une de ces v'erit'es accept'ees `a l’heure qu’il est par tous les bons esprits en Allemagne. Le tort de la Russie serait de l’avoir comprise une dizaine d’ann'ees plus t^ot.

Maintenant, si de ces questions de l’int'erieur nous passions `a la situation du dehors, vous parlerai-je, monsieur, de la r'evolution de Juillet et des cons'equences probables qu’elle devait avoir pour votre patrie et qu’elle n’a pas eues? Ai-je besoin de vous dire que le principe de cette explosion, que l’^ame m^eme de ce mouvement c’'etait avant tout le besoin d’une revanche 'eclatante contre l’Europe, et principalement contre vous, c’'etait l’irr'esistible besoin de ressaisir cette pr'epond'erance de l’Occident, dont la France avait si longtemps joui et qu’elle voyait avec d'epit fix'ee depuis trente ans dans vos mains? Je rends assur'ement toute justice au roi des Francais, j’admire son habilet'e, je souhaite une longue vie `a lui et `a son syst`eme… Mais que serait-il arriv'e, monsieur, si, chaque fois que le gouvernement francais a essay'e depuis 1835 de porter ses regards par-dessus l’horizon de l’Allemagne, il n’avait pas constamment rencontr'e sur le tr^one de Russie la m^eme attitude ferme et d'ecid'ee, la m^eme r'eserve, la m^eme froideur, et surtout la m^eme fid'elit'e `a toute 'epreuve, aux alliances 'etablies, aux engagements contract'es? S’il avait pu surprendre un seul instant de doute, d’h'esitation, ne pensez-vous pas que le Napol'eon de la paix lui-m^eme se serait finalement lass'e de retenir toujours cette France, fr'emissante sous sa main, et qu’il l’aurait laiss'ee aller?.. Et que serait-ce, s’il avait pu compter sur de la connivence?..

Monsieur, je me trouvais en Allemagne `a l’'epoque o`u M. Thiers, c'edant `a une impulsion pour ainsi dire instinctive, se disposait `a faire ce qui lui paraissait la chose du monde la plus simple et la plus naturelle, c’est-`a-dire `a se venger sur l’Allemagne des 'echecs de sa diplomatie en Orient; j’ai 'et'e t'emoin de cette explosion, de la col`ere vraiment nationale que cette na"ive insolence avait provoqu'ee parmi vous, et je me f'elicite de l’avoir vue; depuis j’ai toujours entendu avec beaucoup de plaisir chanter le Rheinlied. Mais, monsieur, comment se fait-il que votre presse politique qui sait tout, qui sait par exemple le chiffre exact de tous les coups de poing qui s’'echangent sur la fronti`ere de Prusse entre les douaniers russes et les contrebandiers prussiens, comment, dis-je, n’a-t-elle pas su ce qui s’est pass'e `a cette 'epoque entre les cours d’Allemagne et la Russie? Comment n’a-t-elle pas su, ou ne vous a-t-elle pas inform'e qu’`a la premi`ere d'emonstration d’hostilit'e de la part de la France, 80 000 hommes de troupes russes devaient marcher au secours de votre ind'ependance menac'ee, et que 200 000 hommes les auraient suivis dans les six semaines? Eh bien, monsieur, cette circonstance n’est pas rest'ee ignor'ee `a Paris, et peut-^etre penserez-vous comme moi, quel que soit d’ailleurs le cas que je fasse du Rheinlied, qu’elle n’a pas peu contribu'e `a d'ecider la vieille Marseillaise `a battre si promptement en retraite devant sa jeune rivale.

J’ai nomm'e la presse. Ne croyez pas, monsieur, que j’aie des pr'eventions syst'ematiques contre la presse allemande, ou que je lui garde rancune de son inexprimable malveillance `a notre 'egard. Il n’en est rien, je vous assure; je suis tr`es dispos'e `a lui faire honneur des bonnes qualit'es qu’elle a, et j’aimerais bien pouvoir attribuer en partie au moins ses torts et ses aberrations au r'egime exceptionnel sous lequel elle vit. Ce n’est certes ni le talent, ni les id'ees, ni m^eme le patriotisme qui manquent `a votre presse p'eriodique; `a beaucoup d’'egards elle est la fille l'egitime de votre noble et grande litt'erature, de cette litt'erature qui a restaur'e parmi vous le sentiment de votre identit'e nationale. Ce qui manque `a votre presse, et cela `a un degr'e compromettant, c’est le tact politique, l’intelligence vive et s^ure de la situation donn'ee, du milieu r'eel dans lequel elle vit. Aussi remarque-t-on, dans ses manifestations comme dans ses tendances, je ne sais quoi d’impr'evoyant, d’inconsid'er'e, en un mot de moralement irresponsable qui provient peut-^etre de cet 'etat de minorit'e prolong'ee o`u on la retient.

Comment s’expliquer en effet, si ce n’est par cette conscience de son irresponsabilit'e morale, cette hostilit'e ardente, aveugle, forcen'ee, `a laquelle elle se livre depuis des ann'ees `a l’'egard de la Russie? Pourquoi? Dans quel but? Au profit de quoi? A-t-elle l’air d’avoir une seule fois s'erieusement examin'e, au point de vue de l’int'er^et politique de l’Allemagne, les cons'equences possibles, probables, de ce qu’elle faisait? S’est-elle une seule fois s'erieusement demand'e si, en s’appliquant comme elle le fait, depuis des ann'ees, avec cet incroyable acharnement, `a aigrir, `a envenimer, `a compromettre sans retour les dispositions r'eciproques des deux pays, elle ne travaillait pas `a ruiner par sa base le syst`eme d’alliance sur lequel repose la puissance relative de l’Allemagne vis-`a-vis de l’Europe? Si, `a la combinaison politique la plus favorable que l’histoire e^ut r'ealis'ee jusqu’`a pr'esent pour votre patrie, elle ne cherchait par tous les moyens en son pouvoir de substituer la combinaison la plus d'ecid'ement funeste? Cette p'etulante impr'evoyance ne vous rappelle-t-elle pas, monsieur, `a la gentillesse pr`es toutefois, une espi`eglerie de l’enfance de votre grand Goethe, si gracieusement racont'ee dans ses m'emoires? Vous vous souvenez de ce jour o`u le petit Wolfgang, rest'e seul dans la maison paternelle, n’a pas cru pouvoir mieux utiliser le loisir que l’absence de ses parents lui avait fait, qu’en faisant passer successivement par la fen^etre tous les ustensiles du m'enage de sa m`ere qui lui tombaient sous la main, s’amusant et se r'ejouissant beaucoup du bruit qu’ils faisaient en tombant et en se brisant sur le pav'e? Il est vrai qu’il y avait dans la maison vis-`a-vis un m'echant voisin qui par ses encouragements provoquait l’enfant `a continuer l’ing'enieux passe-temps; mais vous, monsieur, vous n’avez pas m^eme l’excuse d’une provocation semblable…

Encore si dans tout ce d'ebordement de d'eclamation haineuse contre la Russie on pouvait d'ecouvrir un motif sens'e, un motif avouable pour justifier tant de haine! Je sais que je trouverai au besoin des fous qui viendront me dire le plus s'erieusement possible:

«Nous devons vous ha"ir; votre principe, le principe m^eme de votre civilisation, nous est antipathique `a nous autres Allemands, `a nous autres Occidentaux; vous n’avez eu ni F'eodalit'e, ni Hi'erarchie Pontificale; vous n’avez pass'e ni par les guerres du Sacerdoce et de l’Empire, ni par les guerres de Religion, ni m^eme par l’Inquisition; vous n’avez pas pris part aux Croisades, vous n’avez pas connu la Chevalerie, vous ^etes arriv'e il y a quatre si`ecles `a l’unit'e que nous cherchons encore, votre principe ne fait pas une part assez large `a la libert'e de l’individu, il n’autorise pas assez la division, le morcellement». Tout cela est vrai; mais tout cela, soyez juste, nous a-t-il emp^ech'e de vous aider bravement et loyalement dans l’occasion, lorsqu’il s’est agi de revendiquer, de reconqu'erir votre ind'ependance politique, votre nationalit'e, et maintenant n’est-ce pas le moins que vous puissiez faire, que de nous pardonner la n^otre? Parlons s'erieusement, car la chose en vaut la peine. La Russie ne demande pas mieux que de respecter votre l'egitimit'e historique, la l'egitimit'e historique des peuples de l’Occident; elle s’est d'evou'ee avec vous, il y a trente ans `a peine, `a la relever de sa chute, `a la replacer sur sa base; elle est donc tr`es dispos'ee `a la respecter non seulement dans son principe, mais m^eme dans ses cons'equences les plus extr^emes, m^eme dans ses 'ecarts, m^eme dans ses d'efaillances; mais vous aussi, apprenez `a votre tour `a nous respecter dans notre unit'e et dans notre force.

Viendrait-on me dire que ce sont les imperfections de notre r'egime social, les vices de notre administration, la condition de nos classes inf'erieures, etc., etc., que c’est tout cela qui irrite l’opinion contre la Russie. Eh quoi, serait-ce vrai? Et moi qui croyais tout `a l’heure avoir `a me plaindre d’un exc`es de malveillance, me verrai-je oblig'e maintenant de protester contre une exag'eration de sympathie? Car enfin, nous ne sommes pas seuls au monde, et si vous avez en effet un fond aussi surabondant de sympathie humaine, et que vous ne trouviez pas `a le placer chez vous et au profit des v^otres, ne serait-il pas juste au moins que vous le r'epartissiez d’une mani`ere plus 'equitable entre les diff'erents peuples de la terre? Tous, h'elas, ont besoin qu’on les plaigne; voyez l’Angleterre par exemple, qu’en dites-vous? Voyez sa population manufacturi`ere; voyez l’Irlande, et si vous 'etiez `a m^eme d’'etablir en parfaite connaissance le bilan respectif des deux pays, si vous pouviez peser dans des balances 'equitables les mis`eres qu’entra^inent `a leur suite la barbarie russe et la civilisation anglaise, peut-^etre trouveriez-vous plus de singularit'e que d’exag'eration dans l’assertion de cet homme qui, 'egalement 'etranger aux deux pays, mais les connaissant tous deux `a fond, affirmait avec une conviction enti`ere «qu’il y avait dans le Royaume-Uni un million d’hommes, au moins, qui gagneraient beaucoup `a ^etre envoy'es en Sib'erie»…

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