Том 4. Письма 1820-1849
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Не пишу вам о нашем здешнем образе жизни; мы живем очень уединенно и тихо. Дети, Мальтиц и его жена, тетка Клотильды, ее отец и братья* — вот кто составляет наше обычное общество. Я часто видаю Северина, который очень дружески ко мне относится. Из русских здесь еще старый граф Толстой со своей дочерью, графиней Закревской*, которая всякий раз, когда я у него бываю, поручает мне передать вам поклон. — На этот раз простите. Напишу вам через несколько дней.
Тютчевым И. Н. и Е. Л., 20–22 января/1-3 февраля 1840*
Munich. Ce 1er f'evrier/20 janvier 1840
Je suis de nouveau bien coupable envers vous, chers papa et maman. Depuis six semaines il ne s’est pas coul'e un jour que je ne me sois s'ev`erement reproch'e de l’avoir laiss'e passer sans vous 'ecrire. Votre derni`ere lettre que j’ai recue il y a quelques jours est venue enfin rompre la glace. Je vous remercie des choses bonnes et affectueuses que vous dites dans cette lettre de ma femme. Elle m'erite `a tout 'egard l’opinion favorable que vous vous en ^etes form'ee. On ne pourrait ^etre meilleure qu’elle n’est, plus vraie, plus aimante et d'evou'ee. Vous l’aimerez certainement d`es que vous la conna^itrez.
Je vois avec peine par votre lettre que vous ^etes beaucoup plus pr'eoccup'es de ma sant'e qu’il n’y a lieu de l’^etre. Depuis six semaines que j’ai commenc'e la cure d’eau j’'eprouve une am'elioration dans ma sant'e que je n’osais plus esp'erer. Il m’est d'emontr'e maintenant, par le bon effet de cette cure que le principe de mon mal 'etait dans les nerfs affaiblis et surexcit'es. Toutes mes autres infirmit'es n’'etaient que la cons'equence de celle-ci. Or il est reconnu que l’eau froide et le grand air sont les seuls moyens de fortifier les n<er>fs. Je ne puis assez me f'eliciter d’avoir, par une sorte d’instinct, re<non>c'e depuis des ann'ees `a toute drogue de pharmacie. C’est l`a ce qui me facilite maintenant le succ`es de ma cure. Mon app'etit, depuis que je l’ai commenc'ee, s’est sensiblement am'elior'e, tous ceux qui me voient s’accordent `a me trouver meilleure mine. Voici, j’esp`ere, ch`ere maman, un bulletin qui doit vous satisfaire. Et ce qui ach`evera de vous rassurer, c’est qu’il y a pr`es de moi quelqu’un dont la facult'e de s’inqui'eter de ma sant'e `a tout propos et hors de propos ne peut se comparer qu’`a celle que je vous ai connu, autrefois, `a vous-m^eme. Car ce n’est certainement pas la faute de ma femme, si je ne me suis pas encore d'efinitivement convaincu que j’'etais de neige et que j’allai fondre et m’'evaporer au premier rayon de soleil.
Nous sommes maintenant en plein carnaval. Les bals se suivent sans interruption. Nous allons beaucoup dans le monde. J’y vais plut^ot par n'ecessit'e que par go^ut. Car la distraction quelqu’elle soit est devenue une v'eritable n'ecessit'e pour moi… Derni`erement S'ev'erine a donn'e un des plus beaux bals de la saison. Je vous ai dit, <je crois>, que S<'ev'erine> s’est pris d’une grande affection pour moi que je paie de retour, plus encore par reconnaissance que par sympathie. Sa position est assez singuli`ere dans ce pays. Il est tr`es bien tra^it'e par le Roi* qui l’estime et l’appr'ecie, mais par contre, il est tr`es peu go^ut'e par la soci'et'e de Munich. Hier il a eu une lettre de Joukoffsky qui lui annonce une prochaine entrevue. Vous savez sans doute que le Grand-Duc H'eritier est attendu le mois prochain `a Darmstadt*, d’o`u il viendra probablement `a Munich, faire une visite `a la Duchesse de Leuchtenberg*. Ici, on s’attend de voir toute la Famille Imp'eriale dans le courant de l’'et'e prochain. Une chose certaine, c’est l’arriv'ee de la Gr<ande>-Duchesse Marie avec son 'epoux qui doivent venir ici au mois de ao^ut, pour passer tout l’hiver `a Munich. Mais il est fortement question aussi d’un voyage que l’Imp'eratrice doit faire, `a la m^eme 'epoque, en Allemagne, d’o`u elle se rendrait en Italie pour y passer l’hiver*. Or, si le projet se r'ealise, il n’y a pas de doute qu’elle passera par ici. Elle s’est trop plu la derni`ere fois dans le pays, pour ne pas d'esirer de le revoir, lors m^eme qu’il n’y aurait pas de raisons de famille, pour l’engager `a y revenir.
On sait aussi ici que le Comte de Nesselrode avait l’intention de venir l’'et'e prochain en Allemagne, probablement aux eaux de Boh`eme. Je d'esire beaucoup que cela se fasse. Car toutes ces puissances sont plus accessibles et plus maniables en pays 'etranger que chez elles. Aussi d`es que je le saurai `a Carlsbad, j’irai le trouver*. Je ne sais pas encore au juste ce que je lui demanderai, mais je demanderai… Une place de secr'etaire de l'egation ne pourrait me convenir. Je ne l’accepterai, en aucun cas. Reste `a savoir, s’ils consentiront `a me nommer conseiller d’ambassade ou, `a d'efaut d’un poste semblable, `a me donner une place un peu convenable au d'epartement…
Derni`erement j’ai eu la boucle de service pour quinze ans… C’est une assez triste indemnit'e pour quinze ann'ees de vie — et quelles ann'ees. Mais, puisqu’en fin j’'etais destin'e `a y survivre, — acceptons la vie et la boucle telles qu’elles nous viennent. Si seulement on pouvait oublier…
Ce 3 f'evrier
Parlons maintenant de mes affaires. Il y a six mois que je me propose de vous en parler. Mais une invincible r'epugnance m’a emp^ech'e jusqu’`a pr'esent d’aborder ce sujet. Et si vous n’avez pas, cher papa, parl'e le premier, peut-^etre aurais-je pers'ev'er'e `a me taire. J’ai appris avec peine la g^ene du moment que les mauvaises r'ecoltes de l’ann'ee derni`ere vous font 'eprouver et je serais d'esesp'er'e de venir dans un pareil moment. Soyez bien persuad'e que s’il ne s’agissait que de moi j’aurais d`es `a pr'esent renonc'e de bon coeur et `a tout jamais `a la pension que vous me faisiez autrefois. Ma femme, sans avoir une grande fortune, en a assez pour nous faire vivre tous les deux, et elle ne demanderait pas mieux que de la d'epenser pour moi, jusqu’au dernier sou. Aussi depuis le mois de juillet dernier moi aussi, bien que les enfants, nous vivons enti`erement `a son frais, et de plus, aussit^ot apr`es notre mariage elle a pay'e pour moi vingt mille roubles de dettes. Encore une fois, elle a fait cela avec empressement, avec bonheur, et il n’a pas d'ependu d’elle que je n’y attachasse aussi peu d’importance qu’elle y en a mis elle-m^eme.
Mais `a tort ou `a raison, il m’est tout `a fait impossible d’accepter un pareil arrangement comme d'efinitif*. Je pourrais peut-^etre encore me r'esigner, pour ce qui me concerne personnellement, `a vivre `a ses d'epens, mais vous comprenez que je ne pourrais consentir `a lui imposer `a tout jamais l’entretien de mes enfants. C’est d'ej`a bien assez des soins de tout genre qu’elle voue `a leur 'education, elle qui jusqu’`a pr'esent ne s’est jamais trouv'ee dans le cas de s’occuper de rien de pareil. Mais si outre les soins je devais encore mettre `a sa charge la d'epense mat'erielle de leur entretien et de leur 'education, ceci, je vous avoue, me g^aterait tout `a fait le bonheur que j’'eprouve `a avoir gard'e ces enfants aupr`es de moi. Telles sont, cher papa, les raisons qui m’emp^echent de renoncer `a la pension de 6000 r<oubles> qui vous me ferez et qui font que tout en regrettant, plus que je ne puis le dire, l’embarras que je vous cause, j’accepte avec reconnaissance la promesse que vous me faites dans votre lettre de me la continuer. J’ai tout lieu d’esp'erer que dans le courant de cet 'et'e je r'eussirai `a obtenir une place, soit `a l’'etranger, soit `a St-P'etersbourg. Et si cette place est telle que je le d'esire, je serais trop heureux de pouvoir alors vous d'elivrer de la charge que je vous impose en ce moment.
Cette lettre vous trouvera encore `a Minsk, pour plus de s^uret'e. C’est `a Nicolas que je l’adresse, en le priant de vous le faire parvenir. Nous avons eu tout r'ecemment de ses nouvelles de Varsovie. Il a 'ecrit `a ma femme une lettre tr`es bonne et tr`es aimable, pour lui dire qu’il consentait `a ^etre le parrain de l’enfant qui va venir. Mais il se trouve qu’il a un concurrent dans la personne de Mr de S'ev'erine qui veut `a toute force ^etre aussi le parrain du dit enfant. Pour moi, je ne demande pas mieux pourvu qu’il soit entendu que Nicolas est le parrain № 1.
Bien des remerciements `a ma ch`ere Doroth'ee pour son souvenir. Elle me pardonnera de ne pas lui 'ecrire s'epar'ement, ni aussi longuement que je le voudrais.
Je pense bien souvent `a elle et lui fais voeux les plus sinc`eres pour qu’elle soit heureuse. Comment va sa sant'e? Votre pr'esence, ch`ere maman, doit lui ^etre d’une grande consolation. Restez-vous encore longtemps `a Minsk? Dans sa lettre `a ma femme il y a un souvenir que je lie pour moi `a tout ce que j’ai de plus cher et de plus intime dans l’^ame. C’est celui de ce pauvre enfant qu’elle a perdu — n'e le jour m^eme de mon d'epart d’aupr`es de vous et mort sur les bras de celle qui n’a pas tard'e `a le suivre*. Il serait beau d’aller les rejoindre.
Adieu, chers papa et maman. J’attends impatiemment de vos nouvelles. Il y a dans votre derni`ere lettre un mot sur la sant'e de maman qui m’inqui`ete beaucoup. Que Dieu vous conserve et vous prot`ege et qu’Il daigne nous accorder la gr^ace de nous revoir encore une fois. — A bient^ot.
Mes amiti'es `a Mr
Целую ваши ручки.
Ф. Тютчев
Мюнхен. 1 февраля/20 января 1840
Я опять очень виноват перед вами, любезнейшие папинька и маминька. За истекшие полтора месяца не проходило ни одного дня, чтобы я не укорял себя за то, что день прошел, а я опять не написал вам. Ваше последнее письмо, полученное мною несколько дней тому назад, послужило наконец для меня примером. Благодарю вас за добрые и сердечные слова, сказанные вами в этом письме о моей жене. Она во всех отношениях заслуживает благоприятного мнения, которое вы о ней составили. Нельзя быть лучше нее, более искренней, более любящей и преданной. Вы несомненно полюбите ее, как только узнаете.