Том 7. О развитии революционных идей в России
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Ce n'est pas tout; l'auteur de l'article s'en prend `a ses adversaires d'une mani`ere 'etrange pour leur manque de patriotisme, pour leur peu d'amour de la nation; comme c'est un trait g'en'eral parmi les Slavophiles, il faut en dire quelques mots. Ils pr'etendent au monopole du patriotisme, ils se croient plus russes que quiconque; ils nous reprochent continuellement notre indignation contre l''etat actuel de la Russie, notre peu d'affection pour le peuple, nos paroles am`eres et pleines de col`ere, notre franchise qui consiste `a faire voir le c^ot'e sombre de la vie russe.
Il semblerait pourtant qu'un parti qui s'expose `a la potence, aux mines, `a la confiscation des biens, `a l''emigration, ne manquait ni de patriotisme ni de conviction. Le 14 d'ecembre n'a pas 'et'e, que nous sachions, l'oeuvre des Slavophiles, toutes les pers'ecutions ont 'et'e r'eserv'ees `a nous, le sort a jusqu'ici 'epargn'e les Slavophiles.
Eh bien, oui, il y a de la haine dans notre amour, nous sommes indign'es, nous reprochons au peuple autant qu'au gouvernement l''etat o`u nous nous trouvons; nous ne craignons pas de dire les v'erit'es les plus dures, mais nous les disons parce que nous aimons. Nous ne fuyons pas du pr'esent dans le pass'e, car nous savons que la derni`ere page de l'histoire est l''etat actuel Nous ne fermons pas les oreilles aux cris de douleur du peuple, et nous avons le courage de constater, le coeur navr'e, combien l'esclavage le d'eprave; cacher ces tristes r'esultats, ce n'est pas de l'amour, c'est de la vanit'e. Nous avons sous les yeux le servage et l'on nous accuse de calomnie, et l'on ne veut pas que le triste tableau du paysan pill'e par la noblesse et le gouvernement, vendu presque au poids, d'egrad'e par les verges, mis hors la loi, nous poursuive nuit et jour comme un remords, comme une accusation? Les Slavophiles aiment mieux lire les l'egendes du temps de Vladimir, ils veulent qu'on leur repr'esente Lazare couvert non de plaies, mais d''etoffes de soie. Il faut 'elever pour eux comme pour Catherine des villages en carton et des jardins de coulisse le long des routes, de P'etersbourg jusqu'`a la Crim'ee.
Le grand acte d'accusation que la litt'erature russe dresse contre la vie russe, cette n'egation compl`ete et ardente de nos propres fautes, cette confession qui a horreur de notre pass'e, cette ironie am`ere qui fait rougir du pr'esent, c'est notre esp'erance, c'est notre salut, l''el'ement progressif de la nature russe.
Et quelle est la signification des 'ecrits de Gogol que les Slaves admirent avec tant d'exag'eration? Quelque autre a-t-il plac'e plus haut que lui le pilori auquel il a attach'e la vie russe?
L'auteur de l'article du Moscovite dit que Gogol
Que les Slavophiles m'editent la chute de Gogol. Ils y trouveront plus de logique peut-^etre que de iaiblesse. De l'humilit'e orthodoxe, de l'abn'egation qui place son individualit'e dans celle du prince, `a l'adoration de l'autocrate, il n'y a qu'un pas.
Et que peut-on faire pour la Russie quand on est du c^ot'e de l'empereur? Les temps de Pierre, le grand tzar, sont pass'es; Pierre, le grand homme, n'est plus au Palais d'hiver, il est en nous.
Il est temps de comprendre cela et, quittant enfin une lutte d'esormais pu'erile, de nous r'eunir au nom de la Russie, mais au nom aussi de l'ind'ependance.
Chaque jour peut renverser le vieil 'edifice social de l'Europe entra^iner la Russie dans le courant orageux d'une immense r'evolution. Est-ce le temps de prolonger une querelle de famille et d'attendre que les 'ev'enements nous d'epassent, parce que nous n'avons pr'epar'e ni les conseils, ni les paroles qu'on attend peut-^etre de nous?
Et n'avons-nous pas un champ ouvert `a notre conciliation?
Le socialisme qui partage si d'efinitivement, si profond'ement l'Europe en deux camps ennemis, n'est-il pas accept'e des Slavophiles comme de nous? C'est lo pont sur lequel nous pouvons nous donner la main.
'Epilogue
Pendant les sept ou huit derni`eres ann'ees avant la r'evolution de F'evrier, les id'ees r'evolutionnaires allaient s'accroissant, gr^ace `a la propagande et au travail interne qui prenait un essort de plus en plus consid'erable. Le gouvernement paraissait las de poursuites.
La grande question qui dominait toutes les autres et qui commencait `a agiter le gouvernement, la noblesse et le peuple, c''etait la question de l''emancipation des paysans. On sentait bien qu'il 'etait impossible d'aller plus loin avec le carcan du servage au cou. L'oukase du 2 avril 1842 qui invitait la noblesse `a c'eder quelques droits aux paysans, en retour des redevances et des obligations qu'on avait stipul'ees de part et d'autre, prouve assez clairement, que le gouvernement voulait l''emancipation.
La noblesse des provinces s'en 'emut, se divisa en partis, prenant cause pour ou contre l'affranchissement. On se hasardait `a parler de l''emancipation dans les r'eunions 'electorales. Le gouvernement permit `a la noblesse, dans deux ou trois chels-lieux, de nommer des comit'es pour aviser aux moyens d'affranchir les serfs. Une partie des seigneurs 'etaient exasp'er'es, ils ne voyaient dans cette grande question sociale qu'une attaque de leurs privil`eges et de la propri'et'e et s'opposaient `a toute innovation, se sachant appuy'es par l'entourage du tzar. La jeune noblesse voyait plus clair et calculait mieux. Ici, nous ne parlons pas de ces quelques individus pleins de d'evo^ument et d'abn'egation, qui sont pr^ets `a sacrifier leurs biens, pour effacer le mot d'egradant de servage du front de la Russie et pour expier l'ignoble exploitation du paysan. Les enthousiastes ne peuvent jamais entra^iner une classe enti`ere, si ce n'est en pleine r'evolution, comme la noblesse francaise a 'et'e entra^in'ee le 4 ao^ut 1792 par une g'en'ereuse minorit'e. La grande majorit'e des 'emancipateurs d'esiraient l''emancipation, non seulement parce qu'ils en comprenaient la justice mais aussi parce qu'ils en voyaient la n'ecessit'e. Ils voulaient r'egler l''emancipation `a temps pour r'eduire au minimum les pertes. Ils voulaient prendre l'initiative pendant qu'ils avaient le pouvoir. S'opposer et rester les bras crois'es 'etait le moyen le plus s^ur de voir l'empereur ou le peuple entrer dans la voie pour ne s'arr^eter qu'`a l'expropriation.
Le ministre des domaines publics, Kiss'eloff, le repr'esentant de l''emancipation dans le sein du gouvernement et le ministre de l'int'erieur P'erofski, qui a tu'e l'oukase du 2 avril par ses commentaires,recevaient des projets de toutes les parties de l'empire. Bons ou mauvais, ces projets d'ecelaient une grande pr'eoccupation du pays.
A travers toute la divergence d'opinions et de vues, `a travers toute la diff'erence de position, d'int'er^et de localit'e, un principe 'etait admis sans contestation. Ni le gouvernement, ni la noblesse, ni le peuple ne pensaient `a 'emanciper les paysans sans leurs terres. On variait infiniment dans l'appr'eciation de la quote-part `a conc'eder aux paysans, des conditions `a leur imposer, mais personne ne parlait s'erieusement d'une 'emancipation dans le prol'etariat, si ce n'est quelques incurables adeptes de la vieille 'economie politique.
Cr'eer une vingtaine de millions de – prol'etaires, c''etait une perspective qui faisait, et pour cause, p^alir le gouvernement et les seigneurs. Et pourtant, du point de vue de la religion de la propri'et'e, du droit absolu et imprescriptible de la possession et de l'usage illimit'e, il n'y avait aucun moyen de r'esoudre la question sans une insurrection en masse des paysans, sans un 'ebranlement forc'e de la possession territoriale: puisque les mutations des' propri'et'es faites `a main arm'ee sont accept'ees comme des faits accomplis d^ument l'egalis'es par l''economie politique.