Том 7. О развитии революционных идей в России
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Ceci est-il possible?
Qui peut dire de nos jours ce qui est possible et ce qui ne l'est pas? Le combat n'est pas fini, la lutte continue.
L'avenir de la Russie n'a jamais 'et'e plus 'etroitement uni `a l'avenir de l'Europe qu'il ne l'est aujourd'hui. On a vu nos esp'erances – mais nous ne voudrions r'epondre de rien, non par vanit'e pu'erile, de crainte que l'avenir ne nous donn^at un d'ementi, mais par impossibilit'e de pr'evoir quelque chose dans une question dont la solution ne d'epend pas exclusivement des donn'ees int'erieures.
D'un c^ot'e, le gouvernement russe n'est pas russe, mais en g'en'eral despotique et r'etrograde. Il est plus allemand que russe, comme le disent les Slavophiles, et c'est l`a ce qui explique la sympathie et l'amour avec lequel les autres gouvernements se tournent vers lui. P'etersbourg, c'est la nouvelle Rome, la Rome de l'esclavage universel, la m'etropole de l'absolutisme, voil`a pourquoi l'empereur de Russie fraternise avec l'empereur d'Autriche et l’aide a opprimer les Slaves. Le principe de son pouvoir n'est pas national, et l’absolutisme est plus cosmopolite que la r'evolution.
D'un autre c^ot'e, les esp'erances et les aspirations de la Russie r'evolutionnaire co"incident avec les esp'erances et les aspirations de l'Europe r'evolutionnaire et anticipent sur leur alliance dans l'avenir. L''el'ement national que la Russie apporte, c'est la fra^icheur de la jeunesse et une tendance naturelle vers les institutions socialistes.
L'impasse o`u sont arriv'es les Etats de l'Europe est manifeste. Il leur faut n'ecessairement s''elancer vigoureusement en avant ou reculer plus qu'ils ne le font. Les antith`eses sont trop inexorables, les questions trop tranch'ees et trop m^uries par les souffrances et les haines pour pouvoir s'arr^eter `a des semi-solutions, `a des transactions paisibles entre l'autorit'e et la libert'e. Mais s'il n'y apasde salut pour les Etats dans la forme danslequelle ils existent, le genre de leur mort peut ^etre bien diff'erent. La mort peut venir par la paling'en'esie ou par la putr'efaction, par la r'evolution ou par la r'eaction. Le conservatisme qui n'a d'autre but que la conservation d'un statu quo us'e, est aussi destructif que la r'evolution. Il an'eantit le vieil ordre, non pas par le feu ardent de l'inflammation, mais par le feu lent du marasme.
Si le conservatisme a le dessus en Europe, le pouvoir imp'erial en Russie non seulement 'ecrasera la civilisation, mais il an'eantira toute la classe d'hommes civilis'es, et puis…
Et puis, nous voil`a devant une question toute nouvelle, devant un avenir myst'erieux. L'autocratie, apr`es avoir triomph'e de la civilisation, se trouvera face `a face avec un soul`evement de paysans, avec une r'evolte colossale dans le genre de celle de Pougatcheff. La moiti'e de la force du gouvernement de P'etersbourg est bas'ee sur la civilisation et sur la profonde division qu'il a foment'ee, entre les classes civilis'ees et les paysans. Le gouvernement s'appuie constamment sur les premi`eres, c'est dans le sein de la noblesse qu'il prend les moyens, les hommes et les conseils. En brisant dans ses mains un instrument si essentiel, l'empereur redevient tzar, mais il ne suffira pas pour cela de laisser pousser la barbe et de rev^etir le zipoun. La maison Holstein-Gottorp est trop allemande, trop p'edantesque, trop apprise pour se jeter franchement dans les bras d'un nationalisme `a demi sauvage, pour se mettre `a la t^ete d'un mouvement populaire qui ne voudra au commencement que r'egler ses comptes avec la noblesse, qu''etendre les institutions de la commune rurale `a toutes les propri'et'es, aux villes, `a l'Etat entier.
Nous avons vu une monarchie entour'ee d'institutions r'epublicaines, mais notre imagination se refuse `a concevoir un empereur de Russie entour'e d'institutions communistes.
Avant que cet avenir 'eloign'e se r'ealise, il s'accomplira bien des choses et l'influence de la Russie imp'eriale en sera pas moins funeste pour l'Europe r'eactionnaire que l'influence de cette derni`ere le sera pour la Russie. C'est elle, c'est cette Russie soldatesque qui veut, par les ba"ionnettes, mettre une fin aux questions qui agitent le monde. C'est elle qui mugit et gronde comme la mer aux portes du monde civilis'e, toujours pr^ete `a d'eborder, toujours fr'emissante du d'esir d'envahir, comme si elle n'avait rien `a faire chez elle, comme si des remords et des vertiges troublaient l'esprit de ses souverains.
La r'eaction seule peut ouvrir ces portes. Ce sont les Habsbourg et les Hohenzollern qui solliciteront l'aide fraternelle de l'arm'ee russe et la guideront au coeur de l'Europe.
C'est alors que le grand parti de l'ordre verra ce que c'est qu'un gouvernement fort, ce que c'est que le respect de l'autorit'e Nous conseillons aux petits princes de l'Allemagne d''etudier d`es `a pr'esent le sort des princes royaux de la G'eorgie, auxquels on a donn'e `a P'etersbourg un peu d'argent, le titre d'altesse et le droit d'avoir une couronne royale sur leur voiture. L'Europe r'evolutionnaire, au contraire, ne peut ^etre vaincue par la Russie imp'eriale. Elle sauvera la Russie d'une crise affreuse et elle se sauvera elle-m^eme de la Russie.
Le gouvernement russe, apr`es avoir travaill'e vingt ans, est parvenu `a allier d'une mani`ere indissoluble la Russie `a l'Europe r'evolutionnaire.
Il n'y a plus de fronti`eres entre la Russie et la Pologne.
Or donc, l'Europe sait ce que c'est que la Pologne, cette nation abandonn'ee de tout le monde dans une lutte in'egale, qui depuis a vers'e `a flots son sang 'sur tous les champs de bataille o`u il s'est agi de conqu'erir la libert'e d'un peuple quelconque. On conna^it ce peuple qui, apr`es avoir succomb'e sous le nombre, a travers'e l'Europe en triomphateur plut^ot qu'en vaincu, et s'est dispers'e dans les autres peuples pour leur enseigner, malheureusement sans succ`es, l'art de succomber sans fl'echir, sans s'avilir et sans perdre la foi. Eh bien, on peut an'eantir la Pologne, mais non pas l'asservir, on peut ex'ecuter la menace de Nicolas de ne laisser sur la place de Varsovie qu'une inscription et un tas de pierres, mais la rendre esclave, `a l'instar des provinces paisibles de la Baltique, c'est impossible.
Confondant la Pologne avec la Russie, le gouvernement a 'elev'e un pont immense pour le passage solennel des id'ees r'evolutionnaires, un pont qui commence `a la Vistule et finit `a la Mer Noire. La Pologne est cens'ee morte, mais `a chaque appel elle r'epond
Ce n'est pas de la Pologne, ce n'est pas de la Russie que nous doutons, c'est de l'Europe. Si nous avions quelque foi dans les-peuples d'Occident, avec quel empressement eussions-nous dit aux Polonais:
«Votre sort, fr`eres, est pire que le n^otre, vous avez beaucoup souffert, patience encore; un grand avenir est au bout de vos malheurs. Vous tirerez une vengeance sublime, vons aiderez l''emancipation de ce peuple par les mains duquel on a riv'e vos fers. Dans vos ennemis, au nom du tzar et de l'autocratie, vous reconna^itrez vos fr`eres, au nom de l'ind'ependance et de la libert'e».
Annexe
Sur la commune rurale en Russie
La commune rurale russe subsiste de temps imm'emorial, et les formes s'en retrouvent assez semblables chez toutes les tribus slaves. L`a, o`u elle n'existe pas, elle a succomb'e sous l'influence germanique.Chez les Serbes, les Bulgares et les Mont'en'egrins, elle s'est conserv'ee plus pure encore qu'en Russie. La commune rurale repr'esente pour ainsi dire l'unit'e sociale, une personne morale, l'Etat n'a jamais d^u aller au-del`a; elle est le propri'etaire, la personne `a imposer; elle est responsable pour tous et pour chacun, et par suite elle est autonome en tout ce qui concerne ses affaires int'erieures.