Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
Шрифт:
Qu’est-ce que tout cela signifiait ?
Le Roi des Policiers voulut en avoir le coeur net :
— Michel, demandait-il, que faites-vous ici ?
Mais Michel, au lieu de r'epondre directement `a Juve, s’adressait `a Alice Ricard :
— Madame, annoncait l’inspecteur de la S^uret'e, je suis charg'e par M. Havard de vous prier de vous tenir `a ma disposition. Veuillez donc imm'ediatement me remettre les objets que vous pouvez avoir sur vous.
Juve, `a ce moment, haussait les 'epaules.
« C’est idiot, pensait Juve. Havard n’en fait jamais d’autres. Il a d^u se d'ecider `a faire cette gaffe avant-hier soir, en raison de la d'ecouverte du mouchoir sanglant rue Richer. Parbleu, il veut aller trop vite.
Et Juve ouvrait la bouche pour questionner encore Michel, lorsque celui-ci se retourna vers lui :
— Chef, disait l’inspecteur, je vous pr'eviens que le patron est l`a.
Juve, alors, sursauta encore :
— M. Havard est ici ? demanda-t-il. O`u donc ?
— Dans le jardin, chef, et vous feriez peut-^etre bien d’aller lui causer.
Laissant Fandor dans le salon, Juve se pr'ecipita vers le perron de la villa pour aller aux nouvelles.
Il n’eut pas loin `a courir. `A peine 'etait-il apparu hors de la porte d’entr'ee, qu’une voix le h'elait :
— Tiens, vous ^etes ici, Juve ?… Venez donc, mon bon. Ah, vous savez, je crois que cette fois vous ne pourrez plus invoquer l’hypoth`ese de la fugue ?
C’'etait M. Havard qui interpellait le policier et M. Havard paraissait joyeux au-del`a de toute expression.
`A peine Juve, d’ailleurs, 'etait-il `a ses c^ot'es, que le chef de la S^uret'e lui serrait cordialement la main :
— Mon bon Juve, d'eclarait-il, j’ai la victoire et la victoire d'efinitive. Au fait, vous savez que nous venons de cueillir Fernand Ricard `a la gare de Vernon ?
— Je m’en suis dout'e, r'epondit Juve froidement, en voyant entrer ce malheureux courtier en compagnie de Michel. Mais je vous avoue que je ne comprends rien `a la situation. Patron, vous vous ^etes d'ecid'e `a cette arrestation en raison de la d'ecouverte du mouchoir trouv'e hier rue Richer ?
— En raison de cela, et en raison d’autre chose.
M. Havard souriait toujours. Il imposa silence `a Juve de la main, et appela :
— Monsieur l’inspecteur, passez-moi donc la pi`ece `a conviction !
Il y avait, `a quelques pas du chef de la S^uret'e, un groupe d’individus parmi lesquels Juve distinguait un personnage qui devait ^etre un ouvrier de Vernon et qui s’entretenait avec un homme habill'e de noir, tournant le dos `a Juve.
Cet homme accourut :
— Monsieur le chef de la S^uret'e me demande ? interrogea-t-il.
— Oui, donnez-moi la pi`ece `a conviction.
M. Havard brandit alors, sous les yeux de Juve, deux d'ebris encore humides, encore souill'es de vase et difficilement identifiables.
— Savez-vous ce que c’est, Juve ?
— Ma foi non, patron.
— Regardez bien.
Juve prit les deux objets et les consid'era attentivement.
— Cela, disait-il, c’est une serrure, et cela c’est un morceau de bois.
Alors M. Havard 'eclata sur un ton de triomphe :
— La serrure, Juve, c’est une serrure de malle, on en trouvera facilement le fabricant. Quant aux d'ebris de bois, il provient lui aussi des restes d’une malle, d’une malle jaune, vous comprenez ?
Abasourdi, Juve murmura :
— Patron, vous croyez donc qu’il s’agit l`a des restes de la malle jaune que nous avons vainement recherch'ee ?
— Je ne crois pas, r'epondit M. Havard, je suis certain ! Il y a une nuance.
Et M. Havard avoua brusquement :
— Juve, cette fois-ci, le doute n’est plus permis. Trois minutes d’examen vous convaincront de ce que j’avance. Cette malle jaune, que nous avons tant cherch'ee et qui a servi, en premier lieu, `a transporter le corps du malheureux Baraban, nous ne la retrouverons jamais, pour la bonne raison qu’elle a 'et'e d'etruite. Tout ce qu’il en reste, le voici, mais c’est assez pour constituer une terrible charge contre les assassins. Savez-vous o`u j’ai retrouv'e cela ?
— Ma foi, non, avoua Juve. O`u donc ?
— Dans le puits, tout simplement.
Juve, `a ce moment, paraissait compl`etement ahuri :
— Dans le puits ? r'ep'etait-il. Dans quel puits ? Ah ca, patron, je vous en prie, expliquez-moi les choses clairement, car je ne saisis rien `a ce que vous me racontez.
— Juve, mon cher Juve, c’est pourtant bien simple : voici ce que j’ai fait depuis que je vous ai vu. En partant de la rue Richer, j’'etais convaincu, `a la suite de la d'ecouverte du mouchoir sanglant marqu'e des initiales A. R., que les 'epoux Ricard avaient tremp'e dans le crime, car il y a eu crime, c’est manifeste.
— Ah, fit Juve, et alors ?
— Alors, Juve, j’ai pens'e : il faut que j’arr^ete ces Ricard, mais pour les arr^eter, il faut que j’aie une preuve certaine, irr'efutable. Cette preuve, je l’aurai co^ute que co^ute. Vous me comprenez, Juve ?
— Tr`es bien, remarqua le policier, mais j’attends la suite.
— Laissez-moi parler. L`a-dessus, 'enerv'e, je passai ma nuit `a r'efl'echir, ma journ'ee d’hier aussi, enfin `a cinq heures du matin, vous m’entendez, Juve, `a cinq heures, j’arrivais ici en compagnie de Michel et de l’un de mes nouveaux inspecteurs, celui-l`a, tenez : Jean, je vous pr'esenterai tout `a l’heure.