La livr?e du crime (Преступная ливрея)
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— Attention, commenca-t-il, ne vous retournez pas et 'ecoutez-moi, ayez l’air d’^etre en maraude. Zut pour les contraventions que vous recevrez. 'Ecoutez les instructions qui vont ^etre donn'ees au cocher de ce coup'e.
Et pour que ses paroles eussent plus de poids, Fandor affirmait `a son wattman :
— Je suis de la police.
Et tandis qu’un sergent de ville commencait `a r'eprimander vertement son chauffeur, J'er^ome Fandor entendait distinctement lady Beltham dire `a son cocher :
— J’en ai pour une demi-heure, allez m’attendre devant le minist`ere des Finances, je vous retrouverai l`a.
***
— 'Ecoutez, dit Fandor au conducteur qui l’avait conduit, vous ne vous doutez pas de l’importance de la poursuite que nous venons de r'eussir, mais elle n’est pas finie. Voici ce que nous allons faire : vous allez changer de place avec moi. Prenez mon manteau, c’est moi qui conduirai ce fiacre. Vous en descendrez d’ailleurs ostensiblement quand vous m’entendrez frapper au carreau, vous aurez l’air de me payer. Je veux que l’on croie ma voiture vide.
— Monsieur veut conduire mon fiacre ? Mais si la compagnie le savait ? Si un inspecteur ?
— Assez, je ne vous demande pas votre avis, je vous donne des ordres.
Et comme le wattman semblait peu convaincu, J'er^ome Fandor n’h'esita pas.
Il prit son portefeuille, en tira une carte de la Biblioth`eque Nationale qu’il montra une seconde au digne conducteur du taxi :
— Voici mon brevet d’agent de police et pour vous indemniser de votre journ'ee, voici cinquante francs.
J'er^ome Fandor, en m^eme temps, songeait :
— Zut, j’ai donn'e cent francs tout `a l’heure, t^achons de diminuer les prix et de faire des 'economies.
En m^eme temps, il ajouta :
— D’ailleurs, vous ne risquez rien. Je prends toutes les responsabilit'es `a mon compte. Allons, d'ep^echez-vous. Rendez-vous ce soir `a minuit `a l’Arc de Triomphe, je vous y rendrai votre v'ehicule.
Terroris'e par la mani`ere brusque du journaliste, 'emerveill'e par la carte qu’il venait d’entrevoir, le chauffeur ne fit plus de difficult'es.
En une seconde, il eut rev^etu le veston de Fandor, se fut coiff'e de son chapeau et le journaliste lui-m^eme faisait un tr`es pr'esentable wattman, engonc'e dans le lourd paletot bleu de son chauffeur, le front recouvert de la casquette.
— Montez, ordonna Fandor, et soyez pr^et `a descendre d`es que j’arr^eterai lorsque je frapperai au carreau.
Ce travestissement rapide n’avait dur'e que quelques secondes. J'er^ome Fandor pilotant avec habilet'e le taxi-auto dont il 'etait maintenant le chauffeur, retrouva rapidement, rang'e devant le minist`ere, le coup'e de lady Beltham. Il alla stationner quelques m`etres plus loin :
— Au volant, pensait le journaliste, je suis s^ur de ne pas laisser 'echapper le coup'e. De plus, si par hasard je m’apercois que lady Beltham surveille mon v'ehicule, je n’aurai pour att'enuer ses craintes qu’`a faire descendre mon chauffeur. Elle ne le reconna^itra pas et comme, `a coup s^ur, elle ne pensera pas `a m’identifier sous mon costume de wattman, je pourrai la filer tant que je voudrai.
Vingt minutes plus tard, lady Beltham rejoignait son coup'e, donnait une adresse `a son cocher, le v'ehicule tournait rue de Rivoli, partait dans la direction de la Concorde. Derri`ere lui, le taxi-auto de J'er^ome Fandor s’'ebranla.
C’est d’un bon train que son coup'e suivit la rue de Rivoli, traversa la place de la Concorde, grimpa l’avenue des Champs-'Elys'ees.
— C’est `a l’'Etoile que ca va se d'ecider se dit J'er^ome Fandor. De quel c^ot'e va-t-elle tourner ?
Le coup'e ne tourna pas. Il contourna l’Arc de Triomphe, puis descendit l’avenue de la Grande-Arm'ee.
— Mon Dieu, songea J'er^ome Fandor, o`u diable s’en va donc lady Beltham ? J’imagine que nous n’allons pas franchir l’octroi et sortir de Paris ?
J'er^ome Fandor se trompait. Le coup'e de lady Beltham franchit la grille, fila par la rue de Chartres, vers le coeur de Neuilly.
Comme il franchissait l’octroi, le chauffeur passa la t^ete `a la porti`ere :
— H'e, monsieur, vous oubliez de d'eclarer l’essence.
— L’essence, je m’en fous, ne vous occupez pas de cela, je vous paierai les droits de r'eintroduction.
Le cocher abasourdis, se demandant s'erieusement s’il n’avait pas laiss'e monter sur son si`ege un fou dangereux, n’insista pas. J'er^ome Fandor, au volant, continuait `a r'efl'echir :
— L’'eglise de Neuilly, le boulevard Inkermann, ah c`a… est-ce que par hasard ?
Et soudain, comme le coup'e op'erait un virage savant pour prendre une 'etroite petite rue proprette, J'er^ome Fandor retint mal un juron :
— Ah, nom de Dieu, je m’en doutais, mais qu’est-ce que cela peut donc vouloir dire ?
Sur une plaque indicatrice, J'er^ome Fandor avait lu :
Quelque temps encore le taxi-auto poursuivit le coup'e, puis le coup'e s’arr^eta et J'er^ome Fandor vit lady Beltham en descendre pour entrer `a une petite porte, la porte d’un grand 'etablissement aux airs de couvent, que le journaliste reconnut parfaitement. Lady Beltham venait de p'en'etrer dans le bureau de placement Thorin.
19 – DE L’AMOUR `A LA MORT
Ni S'ebastien ni la belle Rita ne furent au d'ejeuner auquel ils devaient assister.
L’apr`es-midi, Rita d’Anr'emont, soucieuse et perplexe, mais ne n'egligeant pas cependant pour cela les exigences de sa vie de plaisir, s’en 'etait all'ee `a un th'e rejoindre des amies. L’une d’elles avait insist'e pour que Rita rest^at d^iner avec elle, et apr`es de nombreuses h'esitations, la demi-mondaine `a qui son r^ole de garde-malade commencait `a peser, avait d'ecid'e d’accepter la proposition de son amie et de ne pas revenir chez son amant. Elle avait donc t'el'ephon'e pour solliciter l’autorisation de S'ebastien, qu’elle savait ^etre accord'ee d’avance.