Франция: Общественно-политические реалии
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Auguste Comte l'avait senti, qui d'efinissait l''egalit'e comme l'accessibilit'e de tous `a l'in'egalit'e.
Aujourd'hui, le probl`eme est ailleurs. Nous reconnaissons, nous acceptons, que chacun puisse par des voies diff'erentes, rechercher son propre 'epanouissement.Toutes acceptables des lors qu'elles ne nuisent `a personneet s'exercent dans le cadre de nos lois.
Poursuivre au-del`a du droit, au-del`a de la formation, la quete de l''egalit'e,vouloir l'imposer quand chacun, par gypoth`ese, n'a de comptes `a demander qu'`a lui-meme sur ce qu'il a fait de sa vie, c'est faire du systeme politique une machine de nivellement,un pot -pourri d'aigreurs, un 'eteignoir d'ambitions.
33. R'epublique. `A voir certains de nos voisins, de nos amis, on peut parfaitement vivre en monarchie. Les libert'es y sont 'egales, la d'emocratie comparable et parfois m^eme plus ancienne, et le peuple est le souverain r'eel. Si le pouvoir royal semble une survivance, elle a cela de bon qu'elle est garante d'un 'etat d'esprit que les si`ecles ont forg'e, que dans la reine ou bien le roi c'est un pays qui se reconna^it, et qu'il n'est
pas n'ecessaire de chercher ailleurs un symbole d'unit'e que la couronne
suffit `a offrir.
La R'epublique et la d'emocratie sont n'ees ensemble, l'aune del'autre. C'est la d'emocratie qui inspirait, la R'epublique qui agissait. On situe naturellement cette naissance `a la IIIe, car si les pr'ec'edentes, malgr'e les tares dont certains veulent aujourd'hui les affubler, avaient failli dans leurs espoirs, la France le devait `a la violence des r'eactions qu'elles avaient suscit'ees bien plus qu'`a quelque manque de g'en'erosit'e, d''el'evation, des r'evolutionnaires, ceux notamment qui ont enrichi le monde de cette merveille qu'est la D'eclaration de 1789.
Lorsque, `a la fin du si`ecle pr'ec'edent, les p`eres fondateurs ont enracin'e l'id'ee r'epublicaine, ils ont, `a cent ans de distance, r'epondu au souhait de Saint-Just : "Pour fonder la R'epublique, il faut la faire aimer".
Le mot sugg`ere plus qu'il ne dit. Il 'evoque `a la fois une hauteur de vue un peu aust`ere — celle d'un Jules Ferry — et une truculence bonhomme— celle des radicaux de la grande 'epoque —, le courage dans l''epreuve — L'eon Blum au proc`es de Riom —, une 'energie farouche dans la guerre — Clemenceau — autant que dans la paix — Mend`es France —, le sens des responsabilit'es des fonctionnaires en m^eme temps que l'intransigeance sur les libert'es.
34. Laicit'e. Elle est encore une id'ee neuve. Les n'ecessit'es de l'Histoire, celles de la lutte contre la religion d'Etat, ont `a l'exc`es amalgam'e laicit'e avec anticl'ericalisme au point que s'est opacifi'ee la signification d'origine, qui est de n'etre contre aucune croyance mais en dehors de toutes. La laicit'e les respecte mais leur refuse le droit de s'imposer dans les affaires publiques.
Celui auquel sa religion interdit le divorce, l'interruption volontaire de grossesse ou la consommation d'alcool est fid`ele `a lui-meme en les refisant. Il peut etre encore fid`ele `a lui-meme en tentant de convaincre autrui de faire de meme. Mais il est une limite qu'on ne saurait franchir: celle `a partir de laquelle ces pr'eceptes deviendraient des obligations pour ceux qui n'ont pas ces croyances.
Or des malentendus persistants ont obscurci le sens du mot et fait douter de l'mportance qu'il y a, pour la R'epublique, `a en pr'eserver la valeur. La Laicit'e d'esigne la finalit'e poursuivie par nos lois, et par les institutions qui les servent: les r'egles communes qui r'egissent la vie sociale, l`a o`u peuvent intervenir des croyances, doivent etre assez claires pour assurer la coh'esion nationale et le dynamisme collectif; il leur faut en meme temps etre neutres et tol'erantes, pour assurer le respect des conviction priv'ees.
Il en r'esulte des obligations pr'ecises, concernant la famille, la sant'e ou l''ecole notamment. Il n'en d'ecoule pas de cons'equences particuli`eres sur la nature des institutions ou organismes charg'es de ces taches. Ja laicisation progressive de l'hopital n'emporte aux yeux de personne la disqualification des ordres religieux dans le domaine de la sant'e.
Reste l''ecole. La France vit en ce moment un armistice m'ediocre, `a l'ombre duquel murissent des reves tantot de revanche et tantot de victoire 'eclatante. Soyons clair: tout comme il existe des servitudes de s'ecurit'e pour quiconque transporte du public, participe au servise public du transport, meme s'il s'agit d'une campagnie priv'ee, tout 'etablissement aellant du public `a des fins d'enseignement, qu'il soit lui-meme public, priv'e non lucratif, priv'e lucratif, doit integrer aux finalit'es qu'il poursuit celle que la loi commune donne au service public d'enseignement. Neutralit'e devant les croyances, 'egalit'e des diplomes, programmes comparables, qualifications 'equivalentes des maitres sont autant de conditions n'ecessairas pour pr'eserver en France l'unicit'e relative de l'enseignement et 'eviter que se multiplient les 'ecoles ghettos, cr'eatrices d'intol'erance ou d'incompr'ehesion.
35. Libert'e. II para^it qu'il en est de formelles. Certes, on connait l'argu ment : que signifie la libert'e de la pens'ee pour qui est harass'e par un travail p'enible, la libert'e de d'eplacement pour qui n'a pas les moyens de sortir de chez lui, la libert'e d'opinion pour qui sait que le pain de sa famille d'epend d'une d'ecision d'un employeur, la libert'e d'expression pour qui a bien du mal `a ma^itriser la sienne?
Mais `a vouloir mettre la charrue de la prosp'erit'e avant les boeufs de la libert'e, on 'ecrase la libert'e et on d'etruit toute prosp'erit'e. L'Histoire l'a d'emontr'e : elles sont indissociables.
Alors, assez de ces qualificatifs un peu condescendants,
De quelle libert'e s'agit-il ? La France, peuple de droit 'ecrit, a produit l`a-dessus des textes inestimables. La D'eclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 m'eriterait d'^etre connue de tous. Encore faut-il la compl'eter des apports ult'erieurs, ceux que rappellent les pr'eambules constitutionnels de 1946 et 1958.
Tout cela se retrouve dans un admirable document, que le monde doit `a Ren'e Cassin et auquel lui-m^eme a d^u son prix Nobel de la paix : la D'eclaration universelle des droits de l'homme, adopt'ee par l'ONU en 1948.Voil`a ce qu'est le minimum de civilisation: le pain et la D'eclaration des droits. On peut dire autreument: c'est l`a le minimum ; au-del`a de celui-ci, on discute, on argumente, on critique, on am'eliore. En dec`a, on combat.
36. Solidarit'e. Elle est un pari sur l'homme, un de plus, mais sur qui d'autre parier ? Pari sur sa raison et pari sur son coeur. Si l'homme, comme on a parfois la tentation de le croire, ne fait bien que le mal, alors oublions la solidarit'e et cherchons autre chose. Mais s'il est aussi capable du meilleur, s'il est assez conscient pour vouloir ma^itriser ses pulsions mauvaises, invit'e `a le faire par cette belle faconneuse qu'on appelle la civilisation, alors la solidarit'e est justement ce qui le distingue, mieux que ne font les mains ou le langage, des autres animaux. On ignore si le sentiment de solidarit'e rel`eve de l'acquis ou de l'inn'e. Seul importe qu'il soit et que nous l'encouragions. Savoir qu'`a l''echelle de l'esp`ece il n'est pas de sauvetage individuel, qu'aider les autres c'est 'egalement s'aider soi-m^eme, voir que l''ego"isme peut ^etre productif d`es lors qu'on a compris qu'on ne peut g'en'eralement le satisfaire si les autres ne le peuvent aussi, voil`a bien des prises de conscience qui sont dans l'air du temps, qu'il faut acc'el'erer. Si le coeur ne suffit pas, la raison est pr^ete `a la rescousse, tant il est 'evident que, m^eme 'economiquement, le bien-^etre de chacun d'epend d'un minimum pour tous