Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
Шрифт:
— En effet. Mais vous savez sans doute le nom de la femme ? Le nom de cette ma^itresse de Baraban ?
— H'elas, M. Juve, je l’ignore.
— Diable ! pensa Fandor, c’est regrettable. Vous ne savez pas davantage le nom ou l’adresse de cet amant de coeur ? poursuivit-il.
— Pas davantage.
— F^acheux.
— Croyez bien, monsieur l’inspecteur, que je suis le premier `a regretter de ne pouvoir vous fournir des renseignements plus d'etaill'es.
Fandor d'ej`a, interrogeait sur un autre point :
— Vous ne savez pas, demandait-il, si par hasard, Baraban fr'equentait dans les environs un de ces h^otels hospitaliers ?
Mais le g'erant ne le laissa pas achever :
— Monsieur, d'eclarait-il, la devise de l’'etablissement ici, est
— Parfaitement. Eh bien, je vous remercie, je vais rapporter ces renseignements `a la S^uret'e, et ordonner des recherches. Je reviendrai probablement demain.
Le g'erant s’inclina faisant mine de se retirer. Fandor le rappela :
— Surtout, recommandait-il, pas un mot de cette enqu^ete n’est-ce pas ? Pas un mot `a personne.
— Soyez tranquille, monsieur.
Fandor songeait `a cet instant, qu’une recommandation de discr'etion n’'etait pas superflue, car, en v'erit'e, il ne se souciait point de cr'eer des ennuis `a Juve dont il venait d’usurper la personnalit'e.
Certain cependant que son enqu^ete resterait secr`ete, Fandor acheva rapidement de d^iner :
Du Crocodile, J'er^ome Fandor se rendit chez lui.
Il avait pris soin, toutefois, de mettre deux enveloppes `a la bo^ite, `a la poste de la rue de Douai.
L’une, adress'ee `a M. Havard, contenait la facture du d^iner, 'epingl'ee `a une carte de visite de Juve, l’autre adress'ee `a Juve lui-m^eme, contenait, avec la carte de visite de Fandor, la carte de police de l’inspecteur de la S^uret'e.
« Ma foi, se r'ep'etait Fandor ce soir-l`a, en s’'etendant sur son lit, je voudrais bien savoir la t^ete que fera Juve demain matin. Il sera furieux d’abord en retrouvant son « oeil [9] » et en voyant que je le lui avais emprunt'e. Mais il sera content quand je lui apprendrai les premiers r'esultats de mon enqu^ete. »
Le journaliste ferma les yeux, souffla sa bougie, s’efforca de dormir.
Il y avait `a peine dix minutes qu’il 'etait couch'e, lorsque brusquement, il se dressa dans son lit.
« Ah ca, murmurait-il, est-ce que je suis fou ? Qu’est-ce qui peut faire ce potin-l`a ? »
Il pr^etait l’oreille, il 'ecoutait attentivement.
On e^ut dit que, dans l’'epaisseur de la muraille, quelque chose s’'eboulait.
« Il n’y a pourtant pas de rats », pensa Fandor.
Il 'ecouta quelques minutes encore, puis d'ecida :
« C’est probablement de l’eau qui coule dans une tuyauterie. D'ecid'ement, je deviens loufoque, les moindres craquements m’apparaissent suspects. C’est sans doute parce que je suis dans une ambiance de myst`eres. Dame tout le monde n’a pas un assassin'e comme voisin.
Sur ces constatations tr`es gaies, il mit la t^ete sur son oreiller. Un quart d’heure plus tard, Fandor 'etait au pays des r^eves.
13 – LA NOTE DE JUVE
Tandis que Fandor, goguenard, avait, en quittant Juve le matin m^eme de sa visite au Crocodile, salu'e le d'epart de son ami d’une phrase ironique : « Et voil`a le plus grand policier du monde, le premier inspecteur de la S^uret'e francaise qui se laisse barboter par un ami ses pi`eces d’identit'e les plus pr'ecieuses », l’excellent Juve filait, de toute la vitesse de son taxi-auto, dans la direction du Palais de Justice, sans se douter des railleries que lui adressait Fandor.
« Fandor est un imb'ecile », pensait Juve, « ce blanc-bec s’imagine qu’il va en remontrer aux vieux de la vieille. Allons, si tout marche comme je le pense, ce soir, j’aurai des nouvelles `a lui donner ».
Juve, d’ailleurs, cessa de penser `a Fandor, dont il condamnait la th`ese, pour s’occuper de M. Havard :
« Fandor veut que Baraban ait 'et'e assassin'e, pensait encore le policier, mais il n’admet pas la culpabilit'e de Brigitte et de Th'eodore. C’est d'ej`a quelque chose. Havard, lui, ne recule pas devant cette derni`ere gaffe. Il croit tenir les coupables. Allons, il faudra d'ecid'ement que je ram`ene Baraban par les oreilles `a la Pr'efecture de Police pour prouver qu’en fin de compte c’est moi qui ai raison, et qu’au lieu d’un crime, c’est d’une fugue qu’il s’agit. »
Descendu de voiture au Palais de Justice, Juve montait rapidement aux couloirs de l’instruction. Un juge avait 'et'e commis la veille au soir pour proc'eder `a l’interrogatoire de Brigitte, et `a l’enqu^ete relative `a la d'ecouverte de la malle verte. C’'etait lui que Juve allait voir, d’autant plus d'esireux de se trouver rapidement en sa pr'esence qu’il pensait bien que le magistrat se rangerait `a son opinion.
Juve trouva dans les couloirs de l’instruction deux hommes qui se promenaient nerveusement, `a grands pas, 'echangeant des propos attrist'es.
L’un d’eux courut `a lui.
— Ah monsieur Juve, disait-il, qu’allez-vous nous dire de nouveau ? Sait-on enfin le mot de l’'enigme ?
Juve salua, sourit, prit un air innocent :
— Ma foi, mon cher ma^itre, r'epondait-il, je viens de me lever, je n’ai encore recu aucune communication int'eressante.
Il se trouvait en face de M e Gauvin, plus d'esesp'er'e que jamais, `a la pens'ee que son fils, son pauvre fils, se trouvait compromis, de si f^acheuse mani`ere, dans une aussi terrible histoire.